Il a réitéré son appel à l'occasion de la fête du travail. Fondateur en 2011 du deuxième syndicat tunisien après l'UGTT, Habib Guiza a demandé jeudi à consacrer le pluralisme syndical, en se référant à la Constitution tunisienne.
La Constitution ne garantit cependant pas formellement le pluralisme syndical. L'article 35 assure "la liberté de constituer" des syndicats, sans obliger l'Etat et les patronats à les consulter de manière égalitaire.
Depuis sa création en 1946 et jusqu'en 2011, l'Union générale tunisienne du travail était l'unique centrale syndicale autorisée par l'Etat. Malgré l'arrivée de trois concurrents sur le marché des travailleurs depuis la révolution, l'UGTT y a conservé un quasi-monopole.
Avec 750.000 adhérents revendiqués, elle maintient à bonne distance la CGTT (30.000), l'UTT (50.000) et la nouvelle OTT.
Qui ose bousculer un candidat au prix Nobel?
La centrale est régulièrement glorifiée et valorisée. "Quand l'UGTT rugit, c'est tout le pays qui tremble", écrivait Frida Dahmani en 2012 pour le magazine Jeune Afrique. "Brûler les locaux de l’UGTT, c’est la Tunisie qu’on brûle", clâmait Hela Yousfi sur Nawaat la même année.
Depuis sa confortable assise populaire, l'UGTT entretient des activités diverses qui lui assurent d'importantes rentrées financières. Elle détient un journal (Echaab) et une imprimerie, une agence de voyage (Union tunisienne du tourisme) et un hôtel (Amilcar), ainsi qu'une coopérative active dans l'économie de la pêche et une mutuelle d'assurance.
Forte de son héritage historique, l'UGTT jouit également à l'étranger d'une aura particulière. La centrale a présidé la Confédération des syndicats arabes et demeure l'unique représentant tunisien au sein de la Confédération syndicale internationale.
Son rôle d'intermédiaire autodéclaré lors du dialogue national a récemment valu à la centrale d'être proposée au prix Nobel de la Paix 2014.
Le lancement de la CGTT devait "consacrer le début du pluralisme syndical" en Tunisie, avait annoncé son fondateur Habib Guiza en 2011. Mais les nouveaux acteurs syndicaux dénoncent aujourd'hui leur marginalisation. L'Etat et les patronats ne les consulteraient pas, ou pas assez.
Lors de la grève des employés de l'hypermarché Carrefour en mars 2014, les deux centrales sont entrées en conflit. Au bout de négociations avec l'UGTT, la société avait annoncé un accord "qui satisfait les revendications de tous les ouvriers sans exception". Revendiquant la représentation de la majorité des employés, la CGTT avait alors fustigé un accord dont elle aurait été exclue.
"Nous ne nous opposons pas au pluralisme syndical s'il sert les intérêts des ouvriers", avait réagi l'UGTT.
Dans la même veine, le Secrétaire général de l'UGTT Houcine Abassi aurait conditionné son soutien au principe du pluralisme au maintien du rôle historique de sa centrale.
Le pluralisme n'est pas obligatoire, mais...
Le pluralisme syndical ne découle pas naturellement de la démocratie. Les Etats-Unis, l'Allemagne et les pays scandinaves fonctionnent avec un syndicat unique censé regrouper les intérêts de tous les travailleurs.
Le système pluraliste est compétitif. La politique de l'Etat est censé y être la conséquence des diverses pressions appliquées par les syndicats - à l'instar des grèves - et aboutir à "un équilibre social", expliquaient Etienne Arcq et Bérangère Marques-Pereira dans les années 90.
Problème: La division peut nuire à la capacité des syndicats à mettre la pression sur le gouvernement.
Le système tunisien actuel est plus proche du "néo-corporatisme", qui implique les syndicats, les patronats et l'Etat dans un processus de négociation. Moins basé sur l'affrontement, il insiste sur la coopération entre les acteurs sociaux.
Problème: Le monopole est susceptible de donner trop de pouvoir au syndicat et de défavoriser les intérêts des travailleurs.
En février 2014, une centaine de syndicalistes ont été interrogés dans le cadre du projet DROUCE. 60% de sont exprimés contre le pluralisme syndical, 70% estimant que l'UGTT est "la seule structure légitime".
Des résultats peu étonnants, le projet DROUCE étant soutenu... par l'UGTT.
Membre du Conseil de la Choura d'Ennahdha, Najmeddine Hamrouni avait estimé en 2013 que le "moment crucial" en Tunisie permettait d'accepter que le syndicalisme fut centralisé et renforcé, même s'il débordait sur le fait politique.
"Lorsque nous dépasserons ce moment, nous aurons le temps de penser au pluralisme syndical", précise-t-il.
Le moment est-il dépassé?
La Constitution ne garantit cependant pas formellement le pluralisme syndical. L'article 35 assure "la liberté de constituer" des syndicats, sans obliger l'Etat et les patronats à les consulter de manière égalitaire.
Depuis sa création en 1946 et jusqu'en 2011, l'Union générale tunisienne du travail était l'unique centrale syndicale autorisée par l'Etat. Malgré l'arrivée de trois concurrents sur le marché des travailleurs depuis la révolution, l'UGTT y a conservé un quasi-monopole.
Avec 750.000 adhérents revendiqués, elle maintient à bonne distance la CGTT (30.000), l'UTT (50.000) et la nouvelle OTT.
LIRE AUSSI: Un syndicat islamiste pour contrer l'UGTT?
Qui ose bousculer un candidat au prix Nobel?
La centrale est régulièrement glorifiée et valorisée. "Quand l'UGTT rugit, c'est tout le pays qui tremble", écrivait Frida Dahmani en 2012 pour le magazine Jeune Afrique. "Brûler les locaux de l’UGTT, c’est la Tunisie qu’on brûle", clâmait Hela Yousfi sur Nawaat la même année.
Depuis sa confortable assise populaire, l'UGTT entretient des activités diverses qui lui assurent d'importantes rentrées financières. Elle détient un journal (Echaab) et une imprimerie, une agence de voyage (Union tunisienne du tourisme) et un hôtel (Amilcar), ainsi qu'une coopérative active dans l'économie de la pêche et une mutuelle d'assurance.
Forte de son héritage historique, l'UGTT jouit également à l'étranger d'une aura particulière. La centrale a présidé la Confédération des syndicats arabes et demeure l'unique représentant tunisien au sein de la Confédération syndicale internationale.
Son rôle d'intermédiaire autodéclaré lors du dialogue national a récemment valu à la centrale d'être proposée au prix Nobel de la Paix 2014.
Le lancement de la CGTT devait "consacrer le début du pluralisme syndical" en Tunisie, avait annoncé son fondateur Habib Guiza en 2011. Mais les nouveaux acteurs syndicaux dénoncent aujourd'hui leur marginalisation. L'Etat et les patronats ne les consulteraient pas, ou pas assez.
Lors de la grève des employés de l'hypermarché Carrefour en mars 2014, les deux centrales sont entrées en conflit. Au bout de négociations avec l'UGTT, la société avait annoncé un accord "qui satisfait les revendications de tous les ouvriers sans exception". Revendiquant la représentation de la majorité des employés, la CGTT avait alors fustigé un accord dont elle aurait été exclue.
"Nous ne nous opposons pas au pluralisme syndical s'il sert les intérêts des ouvriers", avait réagi l'UGTT.
Dans la même veine, le Secrétaire général de l'UGTT Houcine Abassi aurait conditionné son soutien au principe du pluralisme au maintien du rôle historique de sa centrale.
Le pluralisme n'est pas obligatoire, mais...
Le pluralisme syndical ne découle pas naturellement de la démocratie. Les Etats-Unis, l'Allemagne et les pays scandinaves fonctionnent avec un syndicat unique censé regrouper les intérêts de tous les travailleurs.
Le système pluraliste est compétitif. La politique de l'Etat est censé y être la conséquence des diverses pressions appliquées par les syndicats - à l'instar des grèves - et aboutir à "un équilibre social", expliquaient Etienne Arcq et Bérangère Marques-Pereira dans les années 90.
Problème: La division peut nuire à la capacité des syndicats à mettre la pression sur le gouvernement.
Le système tunisien actuel est plus proche du "néo-corporatisme", qui implique les syndicats, les patronats et l'Etat dans un processus de négociation. Moins basé sur l'affrontement, il insiste sur la coopération entre les acteurs sociaux.
"Dans ce cadre, les groupes obtiennent un 'monopole de représentation' auprès de l'Etat en échange d'un contrôle sur l'articulation des revendications".
Problème: Le monopole est susceptible de donner trop de pouvoir au syndicat et de défavoriser les intérêts des travailleurs.
En février 2014, une centaine de syndicalistes ont été interrogés dans le cadre du projet DROUCE. 60% de sont exprimés contre le pluralisme syndical, 70% estimant que l'UGTT est "la seule structure légitime".
Des résultats peu étonnants, le projet DROUCE étant soutenu... par l'UGTT.
Membre du Conseil de la Choura d'Ennahdha, Najmeddine Hamrouni avait estimé en 2013 que le "moment crucial" en Tunisie permettait d'accepter que le syndicalisme fut centralisé et renforcé, même s'il débordait sur le fait politique.
"Lorsque nous dépasserons ce moment, nous aurons le temps de penser au pluralisme syndical", précise-t-il.
Le moment est-il dépassé?
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