"En Tunisie, l'orgasme, c'est tabou", glisse la sexologue Khadija Kaaniche au détour d'une phrase.
"Ici, on n'est pas libre de parler d'orgasmes", confirme Kaouther, 21 ans. "Avec mes amis proches, je peux en parler, mais pas trop - déjà parce que peu d'entre elles ont vécu des relations", ajoute Mabrouka. A 28 ans, elle affirme qu'il est "difficile d'échapper aux tabous et aux blocages".
Mais aujourd'hui, c'est le 21 décembre, Journée internationale de l'orgasme décrétée par l'association Global Orgasm for Peace. Alors c'est maintenant, ou jamais. Et en commençant par le début. Il va sans dire que tous les prénoms ont été changés.
Le bon tuyau
Tout a commencé dans les toilettes. A 9 ans, Kaouther est tombée sur l'orgasme par hasard, en utilisant le tuyau des toilettes. "J'ai ressenti un bien-être fou", se souvient la jeune fille. De fil en aiguille, elle se met à "le faire" une fois par semaine, puis trois, toujours en cachette dans ces toilettes. Elle avait découvert la masturbation.
Initialement dédié à l'hygiène, inamovible, démocratisé à travers les foyers, ce tuyau est toujours là quand on en a besoin. Elles sont nombreuses à avoir découvert le plaisir grâce à lui.
Mabrouka s'en souvient également: "J'ai découvert que je ressentais des choses quand je mettais le jet d'eau des toilettes entre mes jambes. Mais ce n'est que plus tard, à 15 ans, qu'elle jouit d'un véritable orgasme clitoridien. "Toujours avec mon tuyau", précise-t-elle en rigolant. Mais le tuyau n'est pas éternel. Elle s'est mise à utiliser ses doigts devant des films érotiques.
Toutes ne sont pas passé par les toilettes. A 13 ans, Farah lisait un magazine pour ado. Des filles y posaient des questions à un sexologue. Farah n'est pas trop au courant. Alors, elle s'y met. "La première période, c'était addictif, je me masturbais dès que je pouvais". Elle a aujourd'hui 38 ans et s'en souvient comme si c'était hier: "Je faisais des records de combien je pouvais en avoir successivement".
Farah n'est pas la seule à avoir séché le tuyau. Les garçons, surtout, ne peuvent pas en tirer grand chose.
Hatem a vécu sa première éjaculation à 16 ans, "en regardant des pornos". Noureddine, lui, n'a pas eu besoin des films. La curiosité lui est venue en même temps que la honte, lorsque des amis en parlaient et qu'il ne comprenait pas.
C'est alors pour lui plus une sensation de mal-être, car il ne savait pas ce qu'il faisait. "Je ne savais pas si c'était autorisé par la religion ou pas".
Ce blocage de la masturbation, la sexologue Khadija Kaaniche l'a vu passer. "Des patientes s'interdisent la masturbation, certaines pensent que c'est interdit par la religion". Elle-même ne sait même pas si c'est interdit ou non.
Noureddine n'a pas arrêté pour autant. "Parfois, à l'école le matin, je ne pensais qu'à la fin de journée, le moment de mon plaisir".
Tous ces orgasmes...
Toutes les femmes ne connaissent pas l'orgasme, loin de là. Khadija Kaaniche a rencontré des femmes qui en parlaient sans vraiment savoir. Alors avant de continuer, un éclaircissement s'impose. Autant laisser parler les personnes concernées.
Les premiers orgasmes de la masturbation sont clitoridiens. Le vaginal vient plus tard (ou pas). Kaouther ne connaît que le premier, mais précise qu'il est "plus fort quand il est vécu avec quelqu'un".
Farah connaît les deux et les différencie clairement:
"De l'électricité qui gèle le corps", tente d'expliquer Mabrouka dans la même veine. Elle rigole toujours après l'avoir eu - "C'est comme ça que le mec est au courant". Mabrouka connait les deux orgasmes. Elle est aussi une femme-fontaine, il y a une éjaculation féminine. "La première fois, j'ai ressenti une forte envie d'uriner, et là, c'est quelque chose d'énorme comme sensation". Le plaisir peut parfois presque devenir trop.
A l'instar de Kaouther, elle préfère également l'orgasme en couple, "avec quelqu'un avec qui on se sent à l'aise". Elle peut alors en avoir plusieurs à la fois.
A deux, toujours mieux?
A 30 ans, Noureddine n'a jamais fait l'amour, mais il a vécu une longue relation. Pas besoin de la pénétration pour procurer un orgasme à la femme. "C'est super, j'ai adoré, on sent qu'on a fait du bien à quelqu'un qui nous tient à coeur".
Khadija Kaaniche rappelle d'ailleurs que la pénétration peut être problématique. Beaucoup subissent le vaginisme, une contraction des muscles qui empêche la pénétration. Elles finissent souvent par venir consulter.
"C'est toujours plus intéressant si on se sent libre de faire ce qu'on veut", souligne Kaouther. Elle a eu son premier orgasme en couple à 15 ans. "Avec les sentiments qui s'en mêlent, ça rend les choses plus fortes". Mais Kaouther se plaint que beaucoup d'hommes oublient que la relation sexuelle est un partage"
Le premier partenaire de Farah avait beaucoup de mal avec la question de l'orgasme. La première fois, elle ne jouit pas, et elle le lui dit.
La performance de l’homme
"Les hommes en Tunisie ont une culture pornographique, ils s'imaginent que le sexe est lié à la performance", note Kaouther. "Les hommes qui ont réussi à me procurer un orgasme ont un complexe de supériorité après. Ils se prennent pour des dieux!""
De l'autre côté de la barrière, Noureddine confirme: "Tous mes amis sont des pros, ils parlent des multiples orgasmes qu’ils arrivent à procurer à leurs centaines de maitresses". Tous des dieux. Noureddine n'intervient jamais.
L'obsession de la performance est un véritable sujet. Quand il pense à sa première fois, Noureddine imagine en rigolant: "Avec toute la pression que je ressentirai, je serai sûrement très mauvais". Pourtant, l'orgasme n'est pas nécessaire tout le temps, affirme Farah. "J'ai eu des relations sans orgasmes, et c'était super quand même".
Mabrouka n'est pas d'accord. Des hommes qui ne lui procurent pas de plaisir parce qu'ils sont trop focalisés sur eux-mêmes, ça ne l'intéresse pas. "C'est trop frustrant".
Alors, la performance, c'est important? Hatem avoue que l'orgasme féminin lui apporte une certaine fierté: "Elle se rappelle de toi après. Pour moi c'est une victoire".
Et le souci de la performance traverse les milieux sociaux. Ce n'est pas pour rien qu'on vend autant le viagra dans les pharmacies que devant les mosquées.
Si la pression de la performance existe, l'autre extrême existe aussi. "D'habitude, l'homme est plutôt concentré sur soi-même", confirme Khadija Kaaniche. Et la femme peut dire au revoir à l'orgasme.
"Certaines ne comprennent même pas ce que c'est"
Elles sont alors plusieurs à divorcer. "Certaines divorcent même juste après le mariage", indique Bochra Belhaj Hmida. L'avocate précise toutefois que l'insatisfaction n'est pas valide devant la loi, car elle n'est pas prouvable. "Seule l'impuissance complète est vraiment reconnue".
Nombreuses sont celles qui n'ont jamais eu d'orgasmes, raconte Bochra.
Khadija Kaaniche souligne pourtant un souci de normalité parmi ses patientes. "Est-ce normal d'avoir des relations sexuelles sans orgasmes?" est une question fréquente.
L'avocate remarque que celles qui commencent à en parler et décident éventuellement de divorcer sont souvent celles qui ont trompé leur mari. D'habitude, les femmes ne considèrent pas qu'on puisse divorcer pour ça, ajoute-t-elle pourtant. Elle se souvient d'une cliente dont le mari demandait le divorce. La femme s'était exclamé:
Les histoires de frustration sont fréquentes. Neila nous a contacté pour raconter l'histoire de son amie.
Cette amie a épousé un homme plus vieux lors d'un mariage semi-arrangé. Leurs relations sexuelles ne la satisfaisait pas. Ils eurent des enfants. Le mari évitait de plus en plus les rapports sexuels. Ils se sont éloignés. Puis, il est devenu impuissant. Les relations ont disparu entièrement. Il s'est braqué. Aujourd'hui, face à l'impuissance, il préfère faire chambre à part. Elle est malheureuse. Est à la limite de le tromper, mais elle n'ose pas. Financièrement dépendante, elle ne divorcera pas.
Ces femmes sont-elles issues de milieux particuliers?
"C'est vrai que les femmes plus instruites sont plus susceptibles d'en parler", avoue Khadija Kaaniche. Mais Maître Belhaj Hmida préfère nuancer: "A travers mon travail, j'ai notamment remarqué qu'il n'y avait pas de différence entre les milieux ruraux et citadins. Parfois, il y a même plus de liberté dans les campagnes".
Un monde orgasmique
"Il faut vulgariser ces sujets-là", affirme Farah, pour laquelle il s'agit d'une priorité, autant pour la société que pour l'individu. Farah avait 30 ans la première fois qu'elle a discuté de l'orgasme avec une amie. "Tout du moins la première fois qu'on m'a répondu". Elle découvre alors qu'une copine âgée de 42 ans n'en avait jamais eu.
Mais dans la famille, "on n'en a jamais parlé", regrette Farah. Kaouther est sur la même longueur d'onde. Elle pense qu'on devrait partager plus, autant en famille qu'entre amis. La première fois qu'elle a eu un orgasme avec un homme, elle a eu honte.
Avec plus d'orgasmes, les gens seraient pourtant moins tendus, dit-elle. "En Tunisie, c'est tabou, mais c'est finalement un plaisir de la vie".
"C'est naturel, intuitif, c'est comme boire ou manger", s'exclame Farah.
Si l’orgasme n’a qu’une seule journée dans l’année, ce n’est pas pour autant qu’il faut s’en abstenir les autres jours.
Kaouther étant la plus jeune, elle a le droit au dernier mot: "Moi, je suis pour un monde orgasmique. Ce serait plus drôle, en tout cas".
"Ici, on n'est pas libre de parler d'orgasmes", confirme Kaouther, 21 ans. "Avec mes amis proches, je peux en parler, mais pas trop - déjà parce que peu d'entre elles ont vécu des relations", ajoute Mabrouka. A 28 ans, elle affirme qu'il est "difficile d'échapper aux tabous et aux blocages".
Mais aujourd'hui, c'est le 21 décembre, Journée internationale de l'orgasme décrétée par l'association Global Orgasm for Peace. Alors c'est maintenant, ou jamais. Et en commençant par le début. Il va sans dire que tous les prénoms ont été changés.
Le bon tuyau
Tout a commencé dans les toilettes. A 9 ans, Kaouther est tombée sur l'orgasme par hasard, en utilisant le tuyau des toilettes. "J'ai ressenti un bien-être fou", se souvient la jeune fille. De fil en aiguille, elle se met à "le faire" une fois par semaine, puis trois, toujours en cachette dans ces toilettes. Elle avait découvert la masturbation.
Initialement dédié à l'hygiène, inamovible, démocratisé à travers les foyers, ce tuyau est toujours là quand on en a besoin. Elles sont nombreuses à avoir découvert le plaisir grâce à lui.
Mabrouka s'en souvient également: "J'ai découvert que je ressentais des choses quand je mettais le jet d'eau des toilettes entre mes jambes. Mais ce n'est que plus tard, à 15 ans, qu'elle jouit d'un véritable orgasme clitoridien. "Toujours avec mon tuyau", précise-t-elle en rigolant. Mais le tuyau n'est pas éternel. Elle s'est mise à utiliser ses doigts devant des films érotiques.
Toutes ne sont pas passé par les toilettes. A 13 ans, Farah lisait un magazine pour ado. Des filles y posaient des questions à un sexologue. Farah n'est pas trop au courant. Alors, elle s'y met. "La première période, c'était addictif, je me masturbais dès que je pouvais". Elle a aujourd'hui 38 ans et s'en souvient comme si c'était hier: "Je faisais des records de combien je pouvais en avoir successivement".
Farah n'est pas la seule à avoir séché le tuyau. Les garçons, surtout, ne peuvent pas en tirer grand chose.
Hatem a vécu sa première éjaculation à 16 ans, "en regardant des pornos". Noureddine, lui, n'a pas eu besoin des films. La curiosité lui est venue en même temps que la honte, lorsque des amis en parlaient et qu'il ne comprenait pas.
"Ils parlaient de masturbation, de comment ils se caressaient. Je suis rentré à la maison, je me suis enfermé dans la salle de bain et je me suis imaginé toutes filles que j'avais connues - et même celle que je n'ai pas connues. J'ai commencé à me caresser. Et là, j'ai senti une chaleur et une envie d'uriner, j'ai couru vers la cuvette. Du sperme a jailli, puis de l'urine. Je me sentais vidé."
C'est alors pour lui plus une sensation de mal-être, car il ne savait pas ce qu'il faisait. "Je ne savais pas si c'était autorisé par la religion ou pas".
Ce blocage de la masturbation, la sexologue Khadija Kaaniche l'a vu passer. "Des patientes s'interdisent la masturbation, certaines pensent que c'est interdit par la religion". Elle-même ne sait même pas si c'est interdit ou non.
Noureddine n'a pas arrêté pour autant. "Parfois, à l'école le matin, je ne pensais qu'à la fin de journée, le moment de mon plaisir".
Tous ces orgasmes...
Toutes les femmes ne connaissent pas l'orgasme, loin de là. Khadija Kaaniche a rencontré des femmes qui en parlaient sans vraiment savoir. Alors avant de continuer, un éclaircissement s'impose. Autant laisser parler les personnes concernées.
Les premiers orgasmes de la masturbation sont clitoridiens. Le vaginal vient plus tard (ou pas). Kaouther ne connaît que le premier, mais précise qu'il est "plus fort quand il est vécu avec quelqu'un".
Farah connaît les deux et les différencie clairement:
" Le vaginal est beaucoup plus diffus, je peux être presque paralysée juste après. Le clitoridien est beaucoup plus foudroyant, comme un éclair."
"De l'électricité qui gèle le corps", tente d'expliquer Mabrouka dans la même veine. Elle rigole toujours après l'avoir eu - "C'est comme ça que le mec est au courant". Mabrouka connait les deux orgasmes. Elle est aussi une femme-fontaine, il y a une éjaculation féminine. "La première fois, j'ai ressenti une forte envie d'uriner, et là, c'est quelque chose d'énorme comme sensation". Le plaisir peut parfois presque devenir trop.
A l'instar de Kaouther, elle préfère également l'orgasme en couple, "avec quelqu'un avec qui on se sent à l'aise". Elle peut alors en avoir plusieurs à la fois.
A deux, toujours mieux?
A 30 ans, Noureddine n'a jamais fait l'amour, mais il a vécu une longue relation. Pas besoin de la pénétration pour procurer un orgasme à la femme. "C'est super, j'ai adoré, on sent qu'on a fait du bien à quelqu'un qui nous tient à coeur".
Khadija Kaaniche rappelle d'ailleurs que la pénétration peut être problématique. Beaucoup subissent le vaginisme, une contraction des muscles qui empêche la pénétration. Elles finissent souvent par venir consulter.
"C'est toujours plus intéressant si on se sent libre de faire ce qu'on veut", souligne Kaouther. Elle a eu son premier orgasme en couple à 15 ans. "Avec les sentiments qui s'en mêlent, ça rend les choses plus fortes". Mais Kaouther se plaint que beaucoup d'hommes oublient que la relation sexuelle est un partage"
Le premier partenaire de Farah avait beaucoup de mal avec la question de l'orgasme. La première fois, elle ne jouit pas, et elle le lui dit.
"J'ai vu se construire petit à petit une chape de plomb, il prenait ça comme un challenge personnel. Pourtant, on avait beaucoup parlé de sexe avant. Les discussions virtuelles ne valent plus rien quand la performance entre en jeu".
La performance de l’homme
"Les hommes en Tunisie ont une culture pornographique, ils s'imaginent que le sexe est lié à la performance", note Kaouther. "Les hommes qui ont réussi à me procurer un orgasme ont un complexe de supériorité après. Ils se prennent pour des dieux!""
De l'autre côté de la barrière, Noureddine confirme: "Tous mes amis sont des pros, ils parlent des multiples orgasmes qu’ils arrivent à procurer à leurs centaines de maitresses". Tous des dieux. Noureddine n'intervient jamais.
L'obsession de la performance est un véritable sujet. Quand il pense à sa première fois, Noureddine imagine en rigolant: "Avec toute la pression que je ressentirai, je serai sûrement très mauvais". Pourtant, l'orgasme n'est pas nécessaire tout le temps, affirme Farah. "J'ai eu des relations sans orgasmes, et c'était super quand même".
Mabrouka n'est pas d'accord. Des hommes qui ne lui procurent pas de plaisir parce qu'ils sont trop focalisés sur eux-mêmes, ça ne l'intéresse pas. "C'est trop frustrant".
Alors, la performance, c'est important? Hatem avoue que l'orgasme féminin lui apporte une certaine fierté: "Elle se rappelle de toi après. Pour moi c'est une victoire".
Et le souci de la performance traverse les milieux sociaux. Ce n'est pas pour rien qu'on vend autant le viagra dans les pharmacies que devant les mosquées.
Si la pression de la performance existe, l'autre extrême existe aussi. "D'habitude, l'homme est plutôt concentré sur soi-même", confirme Khadija Kaaniche. Et la femme peut dire au revoir à l'orgasme.
"Certaines ne comprennent même pas ce que c'est"
Elles sont alors plusieurs à divorcer. "Certaines divorcent même juste après le mariage", indique Bochra Belhaj Hmida. L'avocate précise toutefois que l'insatisfaction n'est pas valide devant la loi, car elle n'est pas prouvable. "Seule l'impuissance complète est vraiment reconnue".
Nombreuses sont celles qui n'ont jamais eu d'orgasmes, raconte Bochra.
"Mais très peu s'en rendent compte. Certaines ne comprennent même pas ce que c'est. Elles peuvent vivre sans pendant longtemps".
Khadija Kaaniche souligne pourtant un souci de normalité parmi ses patientes. "Est-ce normal d'avoir des relations sexuelles sans orgasmes?" est une question fréquente.
L'avocate remarque que celles qui commencent à en parler et décident éventuellement de divorcer sont souvent celles qui ont trompé leur mari. D'habitude, les femmes ne considèrent pas qu'on puisse divorcer pour ça, ajoute-t-elle pourtant. Elle se souvient d'une cliente dont le mari demandait le divorce. La femme s'était exclamé:
"Moi, j'étais patiente, j'acceptais de ne pas avoir d'orgasmes et de sexualité épanouissante... Et voilà qu'il me divorce quand même!"
Les histoires de frustration sont fréquentes. Neila nous a contacté pour raconter l'histoire de son amie.
Cette amie a épousé un homme plus vieux lors d'un mariage semi-arrangé. Leurs relations sexuelles ne la satisfaisait pas. Ils eurent des enfants. Le mari évitait de plus en plus les rapports sexuels. Ils se sont éloignés. Puis, il est devenu impuissant. Les relations ont disparu entièrement. Il s'est braqué. Aujourd'hui, face à l'impuissance, il préfère faire chambre à part. Elle est malheureuse. Est à la limite de le tromper, mais elle n'ose pas. Financièrement dépendante, elle ne divorcera pas.
Ces femmes sont-elles issues de milieux particuliers?
"C'est vrai que les femmes plus instruites sont plus susceptibles d'en parler", avoue Khadija Kaaniche. Mais Maître Belhaj Hmida préfère nuancer: "A travers mon travail, j'ai notamment remarqué qu'il n'y avait pas de différence entre les milieux ruraux et citadins. Parfois, il y a même plus de liberté dans les campagnes".
Un monde orgasmique
"Il faut vulgariser ces sujets-là", affirme Farah, pour laquelle il s'agit d'une priorité, autant pour la société que pour l'individu. Farah avait 30 ans la première fois qu'elle a discuté de l'orgasme avec une amie. "Tout du moins la première fois qu'on m'a répondu". Elle découvre alors qu'une copine âgée de 42 ans n'en avait jamais eu.
Mais dans la famille, "on n'en a jamais parlé", regrette Farah. Kaouther est sur la même longueur d'onde. Elle pense qu'on devrait partager plus, autant en famille qu'entre amis. La première fois qu'elle a eu un orgasme avec un homme, elle a eu honte.
"J'avais l'impression d'avoir fait quelque chose de mal. Un fille qui a du plaisir, c'est comme si elle avait fait quelque chose de mal."
Avec plus d'orgasmes, les gens seraient pourtant moins tendus, dit-elle. "En Tunisie, c'est tabou, mais c'est finalement un plaisir de la vie".
"C'est naturel, intuitif, c'est comme boire ou manger", s'exclame Farah.
Si l’orgasme n’a qu’une seule journée dans l’année, ce n’est pas pour autant qu’il faut s’en abstenir les autres jours.
Kaouther étant la plus jeune, elle a le droit au dernier mot: "Moi, je suis pour un monde orgasmique. Ce serait plus drôle, en tout cas".
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