Quantcast
Channel: Huffington Post Maghreb Athena - All
Viewing all articles
Browse latest Browse all 32453

La gauche la plus bête du monde, Acte II

$
0
0
Le 29 décembre 2013, je publiais un article intitulé "La gauche la plus bête du monde" . J'y traitais d'une part des premiers signes de la tentation hégémonique de Nidaa Tounes avec ses partenaires de l'époque, notamment Al Jomhouri et d'autre part le début de l'entreprise de marginalisation de l'aile gauche du parti de Béji Caïd Essebsi au profit des RCDistes, sobrement appelés destouriens. Au vu des derniers développements de cette tragicomédie, un acte II s'impose.

Rappel des faits: Le conseil national de Nidaa Tounes, tenu le 15 juin, a décidé de présenter des listes autonomes aux élections législatives, listes portant le nom du parti et non celui de l'Union pour la Tunisie (coalition incluant Nidaa Tounes, Al Massar, le Parti Socialiste et le Parti du Travail Patriotique). Cette décision va à l'encontre de celle de l'UPT datée du 12 juin, signée par Taieb Baccouche, secrétaire général de NT et affirmant que les composantes de la coalition allaient présenter des listes communes.

Et depuis, c'est le psychodrame: Mohamed Kilani, secrétaire général du PS, ne pouvant retenir ses larmes, parle de déception. Samir Ettaieb fait part de son étonnement. Des intellectuels se sont à nouveau prêté au jeu de la lettre ouverte suppliant le parti de renoncer à cette décision après lui avoir demandé, dans une précédente missive, de consentir à un petit peu de démocratie interne. Chacun y va de sa petite musique pour traduire son amertume et son affliction.

Il faut dire que ces partis se sont battus pour que Nidaa Tounes ne soit pas exclu, l'incluant volontiers dans le camp des "démocrates" et minimisant le rôle de l'ancien régime en son sein. Kilani rappelle même qu'une partie de la gauche lui a reproché de suivre les RCDistes au lieu de rejoindre sa famille naturelle, le Front Populaire. Ce choix, qu'il ait été motivé par un cynique calcul de boutiquier ou par naïveté est incontestablement une faute politique, car comment peut-on faire confiance à ce genre de formations politiques pour gérer un pays en crise?

Et pourtant, la décision du 15 juin n'est que la suite logique et prévisible des agissements de Nidaa Tounes. Et ce ne sont pas les signes qui ont manqué. Tout d'abord, depuis la création de cette alliance contre-nature qu'est l'Union pour la Tunisie, la position du parti de Béji Caïd Essebsi quant à la constitution d'un front électoral n'a jamais été claire. Il s'agissait de gagner du temps, de gagner en respectabilité et ensuite de décider de la suite à donner. Et puis, regonflé par des sondages très favorables, par une normalisation avec les autres partis politiques - Ennahdha en tête, par un rapprochement entre Ghannouchi et Essebsi et surtout par la non exclusion des anciens RCDistes des prochaines législatives, le parti sebsiste a commencé à prendre de haut ses alliés.

Ainsi, Samy Chapoutout, militant d'Al Massar raconte comment, en marge du dialogue national sur le calendrier électoral, un responsable de NT lui a enjoint d'obéir car les "grands" ont parlé. L'héritier du Parti Communiste Tunisien, fondé en 1934, se fait traiter de "petit" par un parti d'à peine deux ans.

Toujours dans le registre de l'arrogance, Said Aidi, ancien minsitre et membre de NT, a affirmé que l'Union pour la Tunisie se confondait avec Nidaa Tounes dans les objectifs et que, par conséquent, les membres de l'UPT sont les bienvenus sur les listes du parti à la condition expresse de renoncer à leur étiquette d'origine. Comprenne qui pourra.

Khmaies Ksila, membre du bureau politique est encore allé plus loin, niant carrément l'existence d'une aile gauche au sein de son parti. Invité le 16 juin sur Shems FM, il a eu cette phrase terrible "si un membre de Nidaa Tounes se dit de gauche, qu'il aille rejoindre Hamma Hammami au Front Populaire ". Boujemaa Rmili, qui a quitté El Massar pour répondre à l'appel de BCE appréciera.

Comme d'habitude, une partie de la gauche tunisienne est prête, par rejet primaire d'Ennahdha, à avaler plein de couleuvres et à faire preuve d'amnésie. Elle a oublié qu'en 2011, Béji Caïd Essebsi, exalté par les appels du pied du parti islamiste lui promettant le palais de Carthage, a fermé les yeux sur les finances douteuses d'Ennahdha, refusant même de promulguer une loi stricte proposée par l'Instance de Ben Achour sur le contrôle du financement des partis. Cette gauche a oublié que des responsables nidaaistes ont conçu et soutenu la politique économique ultralibérale désastreuse qui a abouti à la révolution de 2010-2011.

Cette gauche a oublié tous ses idéaux de justice sociale et de démocratie pour tendre la main à un parti dirigé par quelqu'un qui, de son propre aveu, a trafiqué des élections et soutenu pendant un demi-siècle la dictature qu'elle était censée combattre. Je me rappelle encore d'une députée Al Massar affirmant sans ciller dans une réunion publique à Paris qu'il fallait s'allier à Nidaa Tounes avant les élections et le combattre par la suite. Force est de constater que ce nouveau RCD avait d'autres plans pour les "0%".

A quelque chose, malheur est bon. Espérons que cette "trahison" serve de leçon à cette gauche. Il n'est pas trop tard, elle peut retrouver sa famille naturelle et constituer un ou plusieurs fronts cohérents. Cela peut même lui permettre de récupérer un électorat déçu par cette alliance contre-nature et qui ne demande qu'à se laisser convaincre par un projet consistant. Ce week-end se tient le congrès constitutif d'Al Massar. Espérons qu'ils fassent les bons choix.


LIRE AUSSI:



Retrouvez les blogs du HuffPost Maghreb sur notre page Facebook.

Viewing all articles
Browse latest Browse all 32453

Trending Articles



<script src="https://jsc.adskeeper.com/r/s/rssing.com.1596347.js" async> </script>