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Corps électoral amputé, démocratie en péril?

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Les prochaines élections seraient elles d'ores et déjà biaisées avant terme? Se dirige-t-on vers la reproduction du psychodrame électoral du 23 octobre 2011 avec ses surprises et ses avatars?

Selon des données avérées, seuls 4 millions d'électeurs environ (sur 7,5 millions) ont participé aux dernières élections qui ont abouti, comme on le sait, à un mariage contre nature ayant donné naissance à une créature hybride appelée "Troïka". Et encore, 530 000 électeurs avaient été autorisés à se présenter aux urnes sans être inscrits.

Autrement dit, près de la moitié du corps électoral, dont près de 700 000 jeunes âgés de 18 à 21 ans, soit une masse considérable de près de 3,5 millions de citoyens en âge de voter, n'est toujours pas inscrite. Empêtrée dans un cafouillis de contraintes juridiques, de lourdeurs administratives et procédurières, de délais supposés incontournables, objet de méfiance quant à la neutralité de certains de ses représentants, notamment dans les régions, l'Instance Supérieure Indépendante pour les Elections (ISIE) peine à conduire une campagne médiatique cahoteuse pour appeler les Tunisiens à s'inscrire sur les listes électorales. Si bien qu'au regard du dernier délai d'inscription fixé au 22 Juillet, il est plus que probable, selon les observateurs, que le nombre des nouveaux inscrits ne dépassera pas au mieux 500 000.

Si l'on excepte quelques voix, positions et initiatives -dont celle de Afek Tounes- qui se sont manifestées, ici ou là, pour attirer l'attention sur l'extrême gravité d'une telle situation et sur ses incidences possibles néfastes sur le succès espéré des prochaines élections, il semble bien que la question ne rencontre qu'indifférence et silence (assourdissant) de la part tant des gouvernants que de l'ensemble de la classe politique et du mouvement associatif.

Il est clair que les gouvernements qui se sont succédé depuis le 23 octobre 2011 sont les principaux responsables de cette impasse. Et il pourrait être légitime, aujourd'hui, de penser que bien des considérations partisanes et des calculs étriqués ont pu y conduire. Mais il ne sert à rien, en la circonstance, de remuer ce passé récent si peu édifiant et qui n'honore guère ses principaux acteurs.

Face à ce problème, deux éléments essentiels doivent être pris en compte. Le premier est que l'inscription sur les listes électorales de chaque citoyen habilité est un droit imprescriptible garanti par la Constitution et que, survenant après une révolution placée sous le signe de la "Liberté et de la Dignité" et alors que la Tunisie amorce un virage crucial de son histoire et de sa transition vers la démocratie, constater que près de la moitié des électeurs risquent d'être proprement spoliés de leur droit à participer aux élections est inacceptable, indigne et trahit l'un des plus nobles objectifs de la révolution.

Le second élément - concomitant - est que rien, en droit n'interdit ni d'amender la loi électorale ni de prolonger les délais impartis à l'inscription de la grande majorité des électeurs ni d'adopter, en tout état de cause, toute mesure consensuelle susceptible d'atteindre un tel objectif. C'est affaire de volonté politique et de fidélité à l'esprit du 14 janvier.

A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles et toute réticence, toute frilosité, toute recherche d'échappatoires en la matière risquent de jeter le doute sinon le discrédit sur la crédibilité et la légitimité d'élections déjà suffisamment en butte à l'indifférence, à la suspicion voire à la défiance de la part de nombreux citoyens déçus par la chose politique pour qu'on ne les vide pas de leur sens et de l'exemplarité qui en est attendue.

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