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Pour un droit universel à la santé !

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Une conférence nationale sur la santé a eu lieu à Tunis, début septembre 2014. Il faut s'en féliciter. Beaucoup de professionnels, d'associatifs et d'organisations non gouvernementales se sont intéressés à cette question cruciale pour notre pays. Les formations politiques doivent évidemment s'en saisir de toute urgence.

Le Front Populaire y réfléchit de longue date car il est convaincu que le droit à la santé et à la protection sociale doivent constituer les piliers du nouveau pacte républicain tunisien conformément aux attentes de la population.

La question avant même d'être économique - même si cette dimension est essentielle - a donc d'abord trait au modèle de société que l'on veut instaurer. Exprimée autrement, elle revient à poser comme principe général que l'économie - de la santé, en l'occurrence - doit se mettre au service de la société notamment quand il s'agit de biens essentiels dont la marchandisation pourrait conduire à altérer dramatiquement la cohésion sociale, déjà mise à mal par des décennies d'aggravation des inégalités dans notre pays.

Financement

Seule une réforme audacieuse permettrait de sortir de l'impasse. Pour que le droit à la santé soit une réalité ainsi que le stipule notre nouvelle Constitution, il doit être garanti par la puissance publique. Comme la citoyenneté est fondée sur la contribution de tous - en fonction des moyens de chacun - au bien-être général, l'impôt constitue le meilleur moyen de répondre à cette exigence. Son caractère progressif permet à la fois l'équité, la redistribution des richesses et la cohésion sociale.

En contrepartie, il octroie à chaque citoyen l'accès aux soins et à la protection sociale. Cette allocation des ressources doit ainsi permettre à tous la possibilité de se faire soigner sans avances de frais (tiers payant) auprès des organismes et des professionnels agréés qui sont ainsi rémunérés par la puissance publique.

La santé (au sens large: soins, prévention) est ainsi garantie par l'Etat. Le reste de la protection sociale (retraites, handicap, chômage) reste du ressort des caisses de sécurité sociale.

À l'aune de ces principes généraux, les mécanismes proposés pour le financement d'une santé solidaire, c'est-à-dire accessible à tout citoyen tunisien quels que soient ses revenus, pourraient être les suivants:

1) Allocation d'un montant minimum de 10% du budget de la nation à la santé publique ;

2) Contribution santé universelle (CSU) sur les revenus du travail et du capital, selon une assiette large et un taux progressif ;

3) La TVA perçue sur les alcools et les tabacs sera reversée au budget de la santé publique

Régulation

La régulation globale de ce système doit être guidée par la juste (et prompte) rémunération des acteurs de la santé. Elle suppose également l'application stricte du « juste soin au meilleur coût », ce qui revient à définir le panier de soins que la collectivité prend en charge.

À cet égard et concernant à titre d'exemple la politique du médicament (et/ou des dispositifs médicaux), seuls ceux dont le service médical rendu (au moindre coût) aura été établi par des commissions d'experts indépendants des industries pharmaceutiques, seront pris en charge.

Dans le même esprit qui veut que tout droit nouveau soit conditionné par des devoirs, il est évident que des dispositifs efficaces de lutte contre la fraude sociale doivent accompagner la mise en place de cette santé universelle tout en veillant dans le même temps à en simplifier le plus possible le fonctionnement.

Organisation des soins

Afin de répondre aux besoins de santé sur l'ensemble du territoire et dans une optique décentralisée qui vise à rapprocher le citoyen des services qui lui sont dus, des agences régionales de santé (ARS) seront créées. Ces ARS sous la tutelle du ministère de la Santé auront, entre autres, pour missions d'organiser 4 niveaux de prise en charge :

1) La santé de base, assurée par des dispensaires ouverts au moins 5 jours dans la semaine selon une amplitude horaire la plus large possible, comprend les soins courants externes (sans hospitalisation), au moins une consultation ayant trait à la protection maternelle et infantile d'une part et à la santé mentale d'autre part.

2) Le secteur public hospitalier concerne toutes les structures de soins qui comportent un volet d'hospitalisation, d'accueil des urgences et de permanence des soins. Toutes les régions sanitaires doivent disposer d'au moins un CHU et d'un ou plusieurs hôpitaux généraux. Il gère également les structures de soins de suite (convalescence) et/ou les maisons médicales d'accueil des personnes âgées dépendantes selon une logique également régionale.

3) Le secteur libéral conventionné comprend les médecins libéraux (généralistes et spécialistes) ainsi que les cliniques qui auront faits le choix de signer une convention avec l'ARS dont ils dépendent.

4) Le secteur libéral non conventionné fonctionne de façon autonome et n'est pas conventionné. Toutefois, l'ARS dans un souci de maillage territorial et pour éviter tout phénomène soit de concentration ou a contrario de désertification médicale, régule l'installation des médecins et/ou des cliniques concernés.

Seules les grandes lignes d'une santé universelle adaptée à la Tunisie ont été esquissées ici. Ce projet, dont il conviendra d'affiner les contours en fonction des préconisations de la conférence nationale de santé, a d'abord pour objectif de répondre à l'impératif de garantir, entre autres, un droit à la santé indissociable de la nouvelle citoyenneté que l'on veut promouvoir. Au-delà des considérations éthiques qui ont été soulignées, il convient également d'insister sur sa pertinence économique. En l'accompagnant d'une refonte juste et équitable de l'impôt, en octroyant un salaire indirect aux citoyens par le biais du tiers payant et en activant un puissant effort d'investissement, sorte de "plan Marshall de la santé", la collectivité améliore l'efficience des acteurs qui la composent en les protégeant vis-à-vis des aléas de la vie, sources de gaspillage conséquent, créé de l'emploi pérenne dans un secteur dynamique comme celui de la santé et mobilise l'épargne nationale et internationale dans de nombreux autres secteurs également créateurs d'emploi (bâtiment, transports).

En somme, l'ambition de ce projet - que seul le Front Populaire propose - est de démontrer qu'il est possible de conjuguer justice sociale et pertinence économique au profit de l'intérêt général de la nation.

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