C'est le jour des élections en Tunisie. Sauf quelques rares exceptions, les bureaux de vote ont ouverts à 7h du matin et devraient fermer leurs portes à 18h.
Dans le calme, les Tunisiens ont fait la queue dimanche pour élire leur Parlement, certains électeurs brandissant fièrement leur doigt taché d'encre indélébile, signe qu'ils ont déjà voté.
"Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit, je suis devant le bureau de vote depuis 5h du matin. J'attends ce moment historique depuis des semaines!", s'exclame Néji Mansour, un ingénieur de 46 ans venu voter au Bardo, dans la banlieue de Tunis.
Rue de Marseille, dans le centre-ville de Tunis, quelques dizaines d'électeurs attendent leur tour. Des observateurs, assis à l'ombre, dans la cour d'école qui sert de centre de vote, écrivent sur des carnets. "Pour le moment tout se passe très bien", affirme Sabra Bano, chef de mission de l'organisation internationale "Gender Concerns". Les journalistes sont venus en nombre mais déjà à la mi-journée, la file s'est considérablement rétrécie.
Dans une salle de classe ornée de dessins d'enfants, une électrice prend son bulletin et se dirige vers "l'isoloir", une planche en carton pliée en trois, décorée du logo de l'ISIE et fixée sur une table d'écolier avec du ruban adhésif. Le buste visible mais les mains et la taille cachée, l'électrice se baisse (pour cocher son bulletin), avant de le placer dans l'urne.
Pendant ce temps, une autre femme trempe son doigt dans l'encre indélébile, avant de se prêter au même rituel. Des observateurs sont assis dans la salle et l'opération se déroule dans le calme et le silence.
Un "devoir"
Beaucoup disent être venus voter par "devoir", malgré une campagne électorale monotone et une désaffection généralisée pour les partis politiques près de quatre ans après une révolution qui avait fait naître d'immenses espoirs.
"Voter, c'est la moindre des choses. Quoi que je pense des partis, c'est mon droit et mon devoir", dit ainsi Haïfa Madfii, une jeune femme venue voter dans le centre de vote de la rue de Marseille.
"Je n'attends rien de particulier, je vote d'abord parce qu'il le faut et pour la Tunisie", dit-elle. A ses côtés, Lamia Allouchi adopte le même discours, laconique. "On veut que la Tunisie redevienne comme avant et même mieux qu'avant", dit-elle. Les deux femmes savaient depuis un moment déjà pour qui elles allaient voter. "Depuis trois ans on a eu le temps d'avoir une idée sur les partis politiques", confirme Haïfa.
"Pour être franche, c'est par devoir que je suis venue voter et non par conviction dans les listes en lice", admet de son côté Safa Helali, une enseignante de 27 ans. "Il s'agit de l'avenir de la jeunesse et des générations d'après".
"Le plus important maintenant, c'est le résultat de ce scrutin. Après tout ce que nous avons vécu durant ces trois dernières années, j'espère que les Tunisiens feront un choix mûr et responsable", ajoute-t-elle.
Depuis la révolution de 2011, la Tunisie a connu de nombreuses turbulences: crises économique et politique, assassinats de deux opposants, mort de dizaines de membres des forces de l'ordre dans des incidents attribués à des groupes jihadistes.
Entre besoin de stabilité et peur d'un retour en arrière
Si beaucoup d'électeurs disent donc voter dans l'espoir de stabiliser le pays après quatre années éreintantes, d'autres s'inquiètent d'un possible retour en arrière. Fethi, la quarantaine, est un cadre moyen travaillant dans une entreprise privée. Il est arrivé au centre de vote avec l'idée de voter pour un parti donné mais a changé d'avis à la dernière minute.
"J'étais tenté de voter pour un parti qui ne me représentait pas forcément mais qui avait plus de chances de l'emporter. Je n'en ai pas eu le courage, j'ai finalement voté selon mes convictions", assure-t-il.
Fethi espère voir une Assemblée représentée par des courants divers, afin de constituer des garde-fous contre une possible tentation hégémonique.
Le vote se déroulait largement dans le calme à travers le pays. "Tout se passe bien jusqu'à présent", se félicite le président d'un bureau de vote au Bardo, Lassaad Jebril, en aidant des personnes âgées à trouver leur salle de vote.
Dans les grandes villes du littoral, plusieurs centre de vote affichaient un taux de participation supérieur à 50%, selon des responsables de l'Instance électorale et des observateurs des réseaux Mourakiboun et ATIDE.
A 14h30, le taux de participation sur l'ensemble du territoire s'élevait à 42%, selon les chiffres officiels de l'ISIE.
Dans la rue, la vie suit son cours
Dans le centre-ville de Tunis, les terrasses de café étaient bondées, comme un dimanche. Des jeunes installés devant leur "express" ou leur "capucin" (café noisette), ne se soucient guère de leurs compatriotes au doigt mauve.
"Je ne peux pas voter, je suis originaire du Sud et je suis inscrit là-bas", a déclaré Youssef, un jeune ouvrier. Youssef travaille dans une usine à Tunis et n'aurait pas eu le temps, ni l'envie, de faire le trajet pour aller voter. "Je n'ai pas demandé, si je pouvais voter ici. A la télé, ils ont dit que ce n'était pas possible, tant pis", a-t-il dit.
Ahmed quant à lui n'a pas envie de "se casser la tête". Chômeur à temps partiel, il travaille de manière ponctuelle sur des chantiers. "Qu'est-ce qu'ils vont m'apporter? Ils disent tous la même chose, ce ne sont que des paroles en l'air", affirme-t-il sur un ton blasé.
"De toute façon, je ne me suis pas inscrit, je n'ai pas voté en 2011 et je ne voterai pas aujourd'hui, ça ne sert à rien", conclut-il.
Dans les centres de vote, plusieurs témoignages rapportent que dans les bureaux réservés aux jeunes (la répartition se fait selon le numéro de la carte d'identité et donc de l'âge des électeurs), l'attente était beaucoup moins longue que pour les électeurs plus âgés.
A Carthage, une mère de famille a attendu quelques heures avant de pouvoir tremper son doigt dans l'encre. Ses filles quant à elles n'ont pas attendu très longtemps. Jugeant cette "désertion des jeunes" "lamentable" et "inconsciente", elle a déploré le fait que les parents n'aient pas "fait leur travail" convenablement.
Après l'heure de pointe matinale, l'affluence dans les centres de vote s'est réduite au fil des heures. Dans les rues de Tunis, des voitures isolées étaient ornées du drapeau tunisien. Les forces de sécurité déployées en grand nombre n'ont pas empêché la vie de suivre son cours, comme un dimanche.
Dans le calme, les Tunisiens ont fait la queue dimanche pour élire leur Parlement, certains électeurs brandissant fièrement leur doigt taché d'encre indélébile, signe qu'ils ont déjà voté.
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"Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit, je suis devant le bureau de vote depuis 5h du matin. J'attends ce moment historique depuis des semaines!", s'exclame Néji Mansour, un ingénieur de 46 ans venu voter au Bardo, dans la banlieue de Tunis.
Rue de Marseille, dans le centre-ville de Tunis, quelques dizaines d'électeurs attendent leur tour. Des observateurs, assis à l'ombre, dans la cour d'école qui sert de centre de vote, écrivent sur des carnets. "Pour le moment tout se passe très bien", affirme Sabra Bano, chef de mission de l'organisation internationale "Gender Concerns". Les journalistes sont venus en nombre mais déjà à la mi-journée, la file s'est considérablement rétrécie.
Dans une salle de classe ornée de dessins d'enfants, une électrice prend son bulletin et se dirige vers "l'isoloir", une planche en carton pliée en trois, décorée du logo de l'ISIE et fixée sur une table d'écolier avec du ruban adhésif. Le buste visible mais les mains et la taille cachée, l'électrice se baisse (pour cocher son bulletin), avant de le placer dans l'urne.
Pendant ce temps, une autre femme trempe son doigt dans l'encre indélébile, avant de se prêter au même rituel. Des observateurs sont assis dans la salle et l'opération se déroule dans le calme et le silence.
Un "devoir"
Beaucoup disent être venus voter par "devoir", malgré une campagne électorale monotone et une désaffection généralisée pour les partis politiques près de quatre ans après une révolution qui avait fait naître d'immenses espoirs.
"Voter, c'est la moindre des choses. Quoi que je pense des partis, c'est mon droit et mon devoir", dit ainsi Haïfa Madfii, une jeune femme venue voter dans le centre de vote de la rue de Marseille.
"Je n'attends rien de particulier, je vote d'abord parce qu'il le faut et pour la Tunisie", dit-elle. A ses côtés, Lamia Allouchi adopte le même discours, laconique. "On veut que la Tunisie redevienne comme avant et même mieux qu'avant", dit-elle. Les deux femmes savaient depuis un moment déjà pour qui elles allaient voter. "Depuis trois ans on a eu le temps d'avoir une idée sur les partis politiques", confirme Haïfa.
"Pour être franche, c'est par devoir que je suis venue voter et non par conviction dans les listes en lice", admet de son côté Safa Helali, une enseignante de 27 ans. "Il s'agit de l'avenir de la jeunesse et des générations d'après".
"Le plus important maintenant, c'est le résultat de ce scrutin. Après tout ce que nous avons vécu durant ces trois dernières années, j'espère que les Tunisiens feront un choix mûr et responsable", ajoute-t-elle.
Depuis la révolution de 2011, la Tunisie a connu de nombreuses turbulences: crises économique et politique, assassinats de deux opposants, mort de dizaines de membres des forces de l'ordre dans des incidents attribués à des groupes jihadistes.
Entre besoin de stabilité et peur d'un retour en arrière
Si beaucoup d'électeurs disent donc voter dans l'espoir de stabiliser le pays après quatre années éreintantes, d'autres s'inquiètent d'un possible retour en arrière. Fethi, la quarantaine, est un cadre moyen travaillant dans une entreprise privée. Il est arrivé au centre de vote avec l'idée de voter pour un parti donné mais a changé d'avis à la dernière minute.
"J'étais tenté de voter pour un parti qui ne me représentait pas forcément mais qui avait plus de chances de l'emporter. Je n'en ai pas eu le courage, j'ai finalement voté selon mes convictions", assure-t-il.
Fethi espère voir une Assemblée représentée par des courants divers, afin de constituer des garde-fous contre une possible tentation hégémonique.
LIRE AUSSI: Le parti "vainqueur" des élections législatives pourrait ne pas choisir le chef du gouvernement
Le vote se déroulait largement dans le calme à travers le pays. "Tout se passe bien jusqu'à présent", se félicite le président d'un bureau de vote au Bardo, Lassaad Jebril, en aidant des personnes âgées à trouver leur salle de vote.
Dans les grandes villes du littoral, plusieurs centre de vote affichaient un taux de participation supérieur à 50%, selon des responsables de l'Instance électorale et des observateurs des réseaux Mourakiboun et ATIDE.
A 14h30, le taux de participation sur l'ensemble du territoire s'élevait à 42%, selon les chiffres officiels de l'ISIE.
Dans la rue, la vie suit son cours
Dans le centre-ville de Tunis, les terrasses de café étaient bondées, comme un dimanche. Des jeunes installés devant leur "express" ou leur "capucin" (café noisette), ne se soucient guère de leurs compatriotes au doigt mauve.
"Je ne peux pas voter, je suis originaire du Sud et je suis inscrit là-bas", a déclaré Youssef, un jeune ouvrier. Youssef travaille dans une usine à Tunis et n'aurait pas eu le temps, ni l'envie, de faire le trajet pour aller voter. "Je n'ai pas demandé, si je pouvais voter ici. A la télé, ils ont dit que ce n'était pas possible, tant pis", a-t-il dit.
Ahmed quant à lui n'a pas envie de "se casser la tête". Chômeur à temps partiel, il travaille de manière ponctuelle sur des chantiers. "Qu'est-ce qu'ils vont m'apporter? Ils disent tous la même chose, ce ne sont que des paroles en l'air", affirme-t-il sur un ton blasé.
"De toute façon, je ne me suis pas inscrit, je n'ai pas voté en 2011 et je ne voterai pas aujourd'hui, ça ne sert à rien", conclut-il.
Dans les centres de vote, plusieurs témoignages rapportent que dans les bureaux réservés aux jeunes (la répartition se fait selon le numéro de la carte d'identité et donc de l'âge des électeurs), l'attente était beaucoup moins longue que pour les électeurs plus âgés.
A Carthage, une mère de famille a attendu quelques heures avant de pouvoir tremper son doigt dans l'encre. Ses filles quant à elles n'ont pas attendu très longtemps. Jugeant cette "désertion des jeunes" "lamentable" et "inconsciente", elle a déploré le fait que les parents n'aient pas "fait leur travail" convenablement.
Après l'heure de pointe matinale, l'affluence dans les centres de vote s'est réduite au fil des heures. Dans les rues de Tunis, des voitures isolées étaient ornées du drapeau tunisien. Les forces de sécurité déployées en grand nombre n'ont pas empêché la vie de suivre son cours, comme un dimanche.
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