Beaucoup de monde en parle, des patients veulent être soignés: "Je dois être addict au sucre", "Je ne peux pas me passer d'une tablette de chocolat... Je peux même faire des kilomètres pour en trouver si il le faut", "Lorsque je commence à manger du sucre, je ne peux plus m'arrêter", "un cookie en appelle un autre", "Une petite douceur me calme les angoisses ou me remonte le moral le soir", "Ce soda, c'est ma drogue, je ne l'aime ni en version light, ni en version zéro (je ne citerai pas de marque)", "Quand je suis à plat, quand je suis contrarié, je m'enfile des tonnes de bonbons". Les exemples sont infinis. Il y a aussi les personnes qui sont plus appétentes au sucré qu'au salé. Un certain nombre de facteurs sont probablement impliqués dans les mécanismes physiologiques mis en jeu dans cette différence interindividuelle.
L'alimentation a des composantes homéostatiques (elle joue un rôle dans notre équilibre naturel) et hédoniques (elle est plaisante), ce qui fait d'elle une forte récompense naturelle potentielle au même titre que le fait de boire de l'eau ou un soda ou de faire l'amour lorsque l'on en a envie ! Les aliments très riches en sucre sont des facteurs de risque potentiels d'obésité, de diabète mais aussi de comportements addictifs.
Déjà à la fin des années 1950, Theron Randolph rapportait qu'une adaptation spécifique à un ou des aliments consommés régulièrement par une personne particulièrement sensible à ces derniers pouvait produire des symptômes d'allure identique à ceux retrouvés dans des processus addictifs. Il s'agissait du blé, du maïs, du café ou des pommes de terre à cette époque. De nos jours, il s'agit plutôt d'aliments très caloriques, overdosés en sucres par exemple.
Certains aliments, mettant en jeu agréablement différents sens comme le goût, l'odorat, la vision, ont des capacités de renforcement positif (Quand ça fait du bien, on fait et on recommence la chose !) comme le tabac, la cocaïne, les opiacés, le cannabis....au début de la maladie addictive selon des travaux d'imagerie cérébrale. Des modifications des informations cérébrales observées lors d'un repas hédonique sont retrouvées dans de nombreux autres types d'addiction. Quand des aliments très sucrés sont consommés en excès, ils vont être source de phénomènes de neuroadaptation à l'origine de symptômes de manque, d'un usage compulsif afin de retrouver cette sensation plaisante des premières fois, d'envies irrésistibles de manger (craving) et d'une dépendance comme avec les drogues finalement ! La dopamine jouerait un rôle mais également les opioïdes dans la réponse hédonique aux goûts et aux aliments très caloriques selon Davis et Loxton. Le système opioïde jouerait même un rôle indirect dans le comportement compulsif de consommation. D'autres neuromodulateurs seraient également impliqués.
Une étude récente en imagerie cérébrale a été réalisée, par Burger et Stice en 2012, chez des adolescents, en bonne santé et à poids normal, qui consommaient régulièrement des glaces et à qui l'on proposait des milk shakes (très riches en sucres, en graisses et à une certaine température). La région cérébrale responsable de la récompense induite était moins stimulée, indépendamment de l'apport énergétique total et de l'excès de masse adipeuse. Il existe une réduction de la réponse cérébrale à une alimentation très sucrée prise de façon régulière chez des sujets qui prennent du poids comparativement à ceux qui n'en prennent pas.
Une étude, réalisée par Lenoir et collaborateurs en 2007, chez l'animal avait montré que le sucre était potentiellement plus addictif que la cocaïne. Les aliments très riches en sucres seraient plus attirants pour les personnes et une source de récompense supérieur à celle de la cocaïne. Cependant, le sucre ne pourrait en aucun cas jouer un rôle de substitution de cette drogue ou d'une autre. A un niveau neurobiologique, les récepteurs aux sucres évoluent dans un environnement archaïque pauvre en sucre et ne sont pas adaptés à des concentrations élevées en sucres provenant de certains types d'aliments. Une stimulation excessive de notre cerveau par des aliments très caloriques et très riches en sucres peut entrainer des modifications importantes de la récompense, une perte de contrôle et générer des processus addictifs chez des sujets vulnérables.
Enfin, le sucre se comporterait comme l'alcool sur le cerveau et le foie en induisant différents types de désordres pour la santé physique. Le psychologique ne peut pas être épargné...
Ces données font finalement écho à ce que l'on retrouve dans les addictions aux substances !
Consommons avec modération du sucre et prenons en charge à l'aide de programmes de soins structurés ceux et celles qui en souffrent.
Un questionnaire permettant d'évaluer l'addiction alimentaire a été développé par Gearhardt et ses collaborateurs en 2009. Il s'agit de la Yale Food Addiction Scale. Nous proposons une traduction française de cette échelle appelée Echelle d'addiction alimentaire (ACCRO ! Flammarion, 2013). Si votre score est élevé ou vous vous posez des questions, n'hésitez pas à en parler à votre médecin traitant qui vous aiguillera.
L'évaluation se fait sur les 12 derniers mois.
Pour les questions 1 à 24, l'évaluation se fait en :
![2014-11-17-tableau1.PNG]()
Des points sont attribués à chaque réponse
1. Quand je commence à manger certains types d'aliments, je finis par en manger plus que prévu
2. Je me retrouve souvent à continuer à consommer certains aliments même si je n'ai plus très faim
3. Je mange jusqu'à en être malade
4. Ne pas manger certains types d'aliments ou en diminuer d'autres est quelque chose pour lequel je m'inquiète
5. Je passe beaucoup de temps à me sentir ralenti ou fatigué après surconsommé
6. Je me retrouve constamment à manger certains aliments toute la journée
7. Quand certains aliments ne sont pas disponibles, je sors de chez moi pour en trouver
8. Il y a eu des fois où j'ai consommé certains aliments si souvent ou en quantités tellement importantes que j'ai commencé à manger au lieu d'aller travailler, ou de passer du temps avec ma famille ou mes amis ou de faire des activités qui me plaisent habituellement
9. Il y a eu des fois où j'ai consommé certains aliments si souvent ou en quantités tellement importantes que j'ai perdu du temps à cause de sentiments négatifs dûs à une suralimentation au lieu d'aller travailler, ou de passer du temps avec ma famille ou mes amis ou de faire des activités qui me plaisent habituellement
10. Il y a eu des fois où j'ai évité certaines situations professionnelles ou sociales, où certains aliments étaient disponibles, par peur de trop manger
11. Il y a eu des fois où j'ai évité certaines situations professionnelles ou sociales, parce que je n'étais pas capable de manger certains aliments la-bas
12. J'ai eu des symptômes de manque comme de l'anxiété, une agitation ou d'autres symptômes physiques quand j'ai arrêté ou diminué certains aliments (ne pas inclure la consommation de produits comme le café, les sodas, le thé et les boissons énergisantes)
13. J'ai consommé certains produits pour ne pas avoir d'anxiété, d'agitation ou d'autres symptômes physiques (ne pas inclure la consommation de produits comme le café, les sodas, le thé et les boissons énergisantes)
14. J'ai trouvé que j'ai augmenté mon désir ou mon envie urgente de consommer certains aliments quand j'ai diminué ou arrêté leur consommation
15. Mon comportement en lien avec la nourriture et le fait de manger est cause de stress
16. J'ai des problèmes de fonctionnement efficace quotidiennement à cause des aliments et du fait de manger (activités quotidiennes, travail, école, activités sociales, familiales, difficultés de santé)
17. Ma consommation alimentaire quotidienne a causé des problèmes psychologiques de type dépression, anxiété, culpabilité
18. Ma consommation alimentaire quotidienne a causé ou aggravé des problèmes physiques
19. Je continue à consommer le même type ou la même quantité d'aliments même si je sais que cela me cause des problèmes psychologiques et/ou physiques
20. La plupart du temps, je trouve que j'ai besoin de manger de plus en plus pour retrouver les sensations que je veux comme réduire des émotions négatives ou augmenter le plaisir
21. Je trouve que consommer la même quantité d'aliments ne réduit pas mes émotions négatives ou n'augmente mes émotions plaisantes comme cela devrait être le cas
22. Je veux diminuer ou arrêter certains types d'aliments
23. J'ai essayé de diminuer ou arrêter certains types d'aliments
24. J'ai réussi à diminuer ou arrêter certains types d'aliments
25. Combien de fois dans l'année écoulée avez vous réussi à diminuer ou arrêter certains types d'aliments ?
![2014-11-17-tableau2.PNG]()
26. Entourez l'(es) aliment(s) avec le(s)quel(s) vous avez des problèmes
Glaces
Chocolat
Pommes
Beignets
Brocolis
Cookies
Gâteaux
Bonbons
Pain
Snacks
Laitue
Pates
Fraises
Riz
Gâteaux apéro
Chips
Frites
Carottes
Steak
Bananes
Bacon
Hamburgers
Cheese burgers
Pizza
Soda
Rien
27. Y a t il d'autres aliments non listés à la question 26 avec lesquels vous avez des problèmes ?
Cotation du questionnaire
Questions 1, 2, 4, 6, 25 : 0 point de 0 à 3 ; 1 point si 4
Questions 3, 5, 7, 9, 12, 13, 14, 15, 16 : 0 point de 0 à 2 ; 1 point pour 3 et 4
Questions 19, 20, 21, 22 : 0 point si 0, 1 point si 1
Question 24 : 1 point si 0 ; 0 point si 1
Questions 8, 10, 11 : 0 point de 0 à 1 ; 1 point de 2 à 4
Les questions 17, 18 et 23 ne sont pas cotées
Les questions 26 et 27 apportent des informations sur les problèmes liés aux aliments dont souffre le ou la patient(e).
L'alimentation a des composantes homéostatiques (elle joue un rôle dans notre équilibre naturel) et hédoniques (elle est plaisante), ce qui fait d'elle une forte récompense naturelle potentielle au même titre que le fait de boire de l'eau ou un soda ou de faire l'amour lorsque l'on en a envie ! Les aliments très riches en sucre sont des facteurs de risque potentiels d'obésité, de diabète mais aussi de comportements addictifs.
LIRE AUSSI: Journée Mondiale du diabète: Une marche sportive organisée à Tunis!
Déjà à la fin des années 1950, Theron Randolph rapportait qu'une adaptation spécifique à un ou des aliments consommés régulièrement par une personne particulièrement sensible à ces derniers pouvait produire des symptômes d'allure identique à ceux retrouvés dans des processus addictifs. Il s'agissait du blé, du maïs, du café ou des pommes de terre à cette époque. De nos jours, il s'agit plutôt d'aliments très caloriques, overdosés en sucres par exemple.
Certains aliments, mettant en jeu agréablement différents sens comme le goût, l'odorat, la vision, ont des capacités de renforcement positif (Quand ça fait du bien, on fait et on recommence la chose !) comme le tabac, la cocaïne, les opiacés, le cannabis....au début de la maladie addictive selon des travaux d'imagerie cérébrale. Des modifications des informations cérébrales observées lors d'un repas hédonique sont retrouvées dans de nombreux autres types d'addiction. Quand des aliments très sucrés sont consommés en excès, ils vont être source de phénomènes de neuroadaptation à l'origine de symptômes de manque, d'un usage compulsif afin de retrouver cette sensation plaisante des premières fois, d'envies irrésistibles de manger (craving) et d'une dépendance comme avec les drogues finalement ! La dopamine jouerait un rôle mais également les opioïdes dans la réponse hédonique aux goûts et aux aliments très caloriques selon Davis et Loxton. Le système opioïde jouerait même un rôle indirect dans le comportement compulsif de consommation. D'autres neuromodulateurs seraient également impliqués.
Une étude récente en imagerie cérébrale a été réalisée, par Burger et Stice en 2012, chez des adolescents, en bonne santé et à poids normal, qui consommaient régulièrement des glaces et à qui l'on proposait des milk shakes (très riches en sucres, en graisses et à une certaine température). La région cérébrale responsable de la récompense induite était moins stimulée, indépendamment de l'apport énergétique total et de l'excès de masse adipeuse. Il existe une réduction de la réponse cérébrale à une alimentation très sucrée prise de façon régulière chez des sujets qui prennent du poids comparativement à ceux qui n'en prennent pas.
Une étude, réalisée par Lenoir et collaborateurs en 2007, chez l'animal avait montré que le sucre était potentiellement plus addictif que la cocaïne. Les aliments très riches en sucres seraient plus attirants pour les personnes et une source de récompense supérieur à celle de la cocaïne. Cependant, le sucre ne pourrait en aucun cas jouer un rôle de substitution de cette drogue ou d'une autre. A un niveau neurobiologique, les récepteurs aux sucres évoluent dans un environnement archaïque pauvre en sucre et ne sont pas adaptés à des concentrations élevées en sucres provenant de certains types d'aliments. Une stimulation excessive de notre cerveau par des aliments très caloriques et très riches en sucres peut entrainer des modifications importantes de la récompense, une perte de contrôle et générer des processus addictifs chez des sujets vulnérables.
Enfin, le sucre se comporterait comme l'alcool sur le cerveau et le foie en induisant différents types de désordres pour la santé physique. Le psychologique ne peut pas être épargné...
Ces données font finalement écho à ce que l'on retrouve dans les addictions aux substances !
Consommons avec modération du sucre et prenons en charge à l'aide de programmes de soins structurés ceux et celles qui en souffrent.
Evaluez-vous !
Un questionnaire permettant d'évaluer l'addiction alimentaire a été développé par Gearhardt et ses collaborateurs en 2009. Il s'agit de la Yale Food Addiction Scale. Nous proposons une traduction française de cette échelle appelée Echelle d'addiction alimentaire (ACCRO ! Flammarion, 2013). Si votre score est élevé ou vous vous posez des questions, n'hésitez pas à en parler à votre médecin traitant qui vous aiguillera.
L'évaluation se fait sur les 12 derniers mois.
Pour les questions 1 à 24, l'évaluation se fait en :
Des points sont attribués à chaque réponse
1. Quand je commence à manger certains types d'aliments, je finis par en manger plus que prévu
2. Je me retrouve souvent à continuer à consommer certains aliments même si je n'ai plus très faim
3. Je mange jusqu'à en être malade
4. Ne pas manger certains types d'aliments ou en diminuer d'autres est quelque chose pour lequel je m'inquiète
5. Je passe beaucoup de temps à me sentir ralenti ou fatigué après surconsommé
6. Je me retrouve constamment à manger certains aliments toute la journée
7. Quand certains aliments ne sont pas disponibles, je sors de chez moi pour en trouver
8. Il y a eu des fois où j'ai consommé certains aliments si souvent ou en quantités tellement importantes que j'ai commencé à manger au lieu d'aller travailler, ou de passer du temps avec ma famille ou mes amis ou de faire des activités qui me plaisent habituellement
9. Il y a eu des fois où j'ai consommé certains aliments si souvent ou en quantités tellement importantes que j'ai perdu du temps à cause de sentiments négatifs dûs à une suralimentation au lieu d'aller travailler, ou de passer du temps avec ma famille ou mes amis ou de faire des activités qui me plaisent habituellement
10. Il y a eu des fois où j'ai évité certaines situations professionnelles ou sociales, où certains aliments étaient disponibles, par peur de trop manger
11. Il y a eu des fois où j'ai évité certaines situations professionnelles ou sociales, parce que je n'étais pas capable de manger certains aliments la-bas
12. J'ai eu des symptômes de manque comme de l'anxiété, une agitation ou d'autres symptômes physiques quand j'ai arrêté ou diminué certains aliments (ne pas inclure la consommation de produits comme le café, les sodas, le thé et les boissons énergisantes)
13. J'ai consommé certains produits pour ne pas avoir d'anxiété, d'agitation ou d'autres symptômes physiques (ne pas inclure la consommation de produits comme le café, les sodas, le thé et les boissons énergisantes)
14. J'ai trouvé que j'ai augmenté mon désir ou mon envie urgente de consommer certains aliments quand j'ai diminué ou arrêté leur consommation
15. Mon comportement en lien avec la nourriture et le fait de manger est cause de stress
16. J'ai des problèmes de fonctionnement efficace quotidiennement à cause des aliments et du fait de manger (activités quotidiennes, travail, école, activités sociales, familiales, difficultés de santé)
17. Ma consommation alimentaire quotidienne a causé des problèmes psychologiques de type dépression, anxiété, culpabilité
18. Ma consommation alimentaire quotidienne a causé ou aggravé des problèmes physiques
19. Je continue à consommer le même type ou la même quantité d'aliments même si je sais que cela me cause des problèmes psychologiques et/ou physiques
20. La plupart du temps, je trouve que j'ai besoin de manger de plus en plus pour retrouver les sensations que je veux comme réduire des émotions négatives ou augmenter le plaisir
21. Je trouve que consommer la même quantité d'aliments ne réduit pas mes émotions négatives ou n'augmente mes émotions plaisantes comme cela devrait être le cas
22. Je veux diminuer ou arrêter certains types d'aliments
23. J'ai essayé de diminuer ou arrêter certains types d'aliments
24. J'ai réussi à diminuer ou arrêter certains types d'aliments
25. Combien de fois dans l'année écoulée avez vous réussi à diminuer ou arrêter certains types d'aliments ?
26. Entourez l'(es) aliment(s) avec le(s)quel(s) vous avez des problèmes
Glaces
Chocolat
Pommes
Beignets
Brocolis
Cookies
Gâteaux
Bonbons
Pain
Snacks
Laitue
Pates
Fraises
Riz
Gâteaux apéro
Chips
Frites
Carottes
Steak
Bananes
Bacon
Hamburgers
Cheese burgers
Pizza
Soda
Rien
27. Y a t il d'autres aliments non listés à la question 26 avec lesquels vous avez des problèmes ?
Cotation du questionnaire
Questions 1, 2, 4, 6, 25 : 0 point de 0 à 3 ; 1 point si 4
Questions 3, 5, 7, 9, 12, 13, 14, 15, 16 : 0 point de 0 à 2 ; 1 point pour 3 et 4
Questions 19, 20, 21, 22 : 0 point si 0, 1 point si 1
Question 24 : 1 point si 0 ; 0 point si 1
Questions 8, 10, 11 : 0 point de 0 à 1 ; 1 point de 2 à 4
Les questions 17, 18 et 23 ne sont pas cotées
Les questions 26 et 27 apportent des informations sur les problèmes liés aux aliments dont souffre le ou la patient(e).
Laurent Karila est l'auteur du livre "Accro!", écrit avec la journaliste au "HuffPost" Annabel Benhaiem
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