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De la tolérance: L'autre est, donc je suis

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A la question "qu'est-ce que c'est que la tolérance?", la réponse de Voltaire dans son dictionnaire philosophique vint claire et limpide comme le mois de Mai en Méditerranée. Je vous la présente: la tolérance, écrit-il, "c'est l'apanage de l'humanité; nous sommes tous pétris de faiblesse et d'erreurs; pardonnons-nous réciproquement nos sottises. C'est la première loi de la nature". C'était en 1764.

Quelques années plus tard, Mirabeau déclara:

"Je ne viens pas prêcher la tolérance; la liberté la plus illimité de religion est à mes yeux, un droit si sacré que le mot tolérance, qui voudrait l'exprimer, me paraît en quelque sorte tyrannique lui-même, puisque l'autorité qui tolère pourrait ne pas tolérer".


Voilà pourquoi le concept de tolérance est de nature à susciter la méfiance. La charge sémantique dont il se trouve traditionnellement investi n'a, de nos jours, aucune chance d'atteindre le piédestal des valeurs humaines, puisqu'elle reconnaît le rapport de force et implique une distinction très nette entre ceux qui tolèrent et ceux qui bénéficient de la tolérance. Elle se présente comme un octroi et non comme un droit. Peut-être nous faut-il inventer un concept entièrement rempli de liberté où il n'y a ni concession dûment réfléchie, ni condescendance généreusement consentie. Le concept à inventer devrait orienter les hommes vers une reconnaissance de soi et de l'autre sans gommer les différences qu'ils se doivent de revendiquer comme une source de richesse. Il nous faut donc un nouveau concept où une égale réciprocité se substitue au rapport de force et exclut tout recours à l'autorité et à une quelconque appropriation de la vérité absolue. Dans ce nouveau concept requis, c'est le règne de la liberté pour tous et de l'égalité entre tous. Il reconnaît la différence et honnit ceux qui se croiraient supérieurs aux autres, même s'ils voulaient octroyer une quelconque tolérance.


Egale réciprocité plutôt que rapport de force

Voilà pourquoi le concept de tolérance est de nature à susciter la méfiance. La charge sémantique, dont il se trouve traditionnellement pourvue, n'a, de nos jours, aucune chance d'atteindre le piédestal des valeurs humaines, puisqu'elle reconnaît le rapport de force et implique une distinction très nette entre ceux qui tolèrent et ceux qui bénéficient de la tolérance. Elle se présente comme un octroi et non comme un droit. Peut-être nous faut-il inventer un concept entièrement rempli de liberté où il n'y a, ni concession dûment réfléchie, ni condescendance généreusement consentie. Le concept à inventer devrait orienter les hommes vers une reconnaissance du moi et de l'autre sans gommer les différences dont ils doivent faire une source de richesse. Il nous faut un nouveau concept où une égale réciprocité se substitue au rapport de force et exclut tout recours à l'autorité et à une quelconque appropriation de la vérité absolue. Dans ce nouveau concept requis, c'est le règne de la liberté pour tous et de l'égalité entre tous. Il reconnaît la différence et honnit ceux qui se croiraient supérieurs aux autres, même s'ils voulaient octroyer une quelconque tolérance.

Le terme arabe, me semble plus adapté. "tasamuḥ تسامح ". Il est issu de la racine " سمح samaḥa " qui recèle des notions comme la permission, l'autorisation, le pardon, la tolérance et l'indulgence. Ce sont à peu près les mêmes matériaux conceptuels que renferme le mot français tolérance. Mais dans le concept arabe, il y a quelque chose d'autre. La sixième forme du verbe arabe " سمح samaḥa " traduit la réciprocité: il s'agit d'une sorte d'autorisation mutuelle; la permission est accordée de part et d'autre. En d'autres termes, les différences sont mutuellement reconnues. Dans une telle perspective, il y a une véritable acceptation réciproque. Or la réciprocité favorise l'échange, facilite le dialogue et génère l'osmose. Dans le concept arabe, il y a la reconnaissance d'un vis-à-vis, la reconnaissance de l'autre sans orgueil ni complexe. Je ne le tolère pas ; je le reconnais en tant que tel, sur un pied d'égalité et en toute liberté.

Mais l'autre, qui est-il? 1+1=1

Mais, l'autre, c'est celui qui n'est pas moi ; il se pose et s'oppose au moi par sa différence. Tout comme l'autre, le moi peut être un individu, une tribu, un groupe, une association, un parti, une nation, une ethnie, une religion, la nature, l'environnement, etc. La trame et la chaîne du moi et d l'autre sont faites d'attitudes et de comportements qui, régis par des normes, par un rituel, tissent l'identité et soulignent la spécificité.

L'autre peut paraître bien loin du moi. La distance est perceptible dans les domaines économiques, politiques, religieux et socio-culturels. L'autre, tout comme le moi, se définit par des volumes, des couleurs, des formes, des parfums, des sons, des banquets, des ambitions, des espoirs, des goûts, des peurs, des manières d'exprimer la joie et de vivre la douleur. Dans tous ces registres, l'autre est autre. Par des rideaux nombreux, divers et opaques, il peut se dérober au moi. Il appartient donc au moi d'éviter les traquenards, et fuir la séduction des leurres. Mais il arrive que le moi agisse de même, en vue de se dérober à l'autre. Entre le moi et l'autre, il y a des rapports à définir et à gérer.

Pour Jean-Paul Sartre, l'autre, c'est l'enfer alors que le 15 mai 1871, dans une lettre à Paul Demeny, Rimbaud s'exclama: "je est un autre". Lorsqu'il y a interférence entre les deux protagonistes et que l'osmose s'installe, c'est l'équation d'or 1+1=1. Ainsi, le moi s'avère être le produit d'une solution dont les composantes restent pourtant elles-mêmes, sans fondre l'une dans l'autre. Mais il y a toujours une dominante. Elle relève tantôt du moi, tantôt de l'autre. N'est-ce pas une dialectique ou plutôt une sublimation.

Dès lors, on se rend compte que le moi n'existe que si l'autre est. Il appartient au moi et à l'autre de déclarer : être, c'est se sentir l'autre. Ils se doivent de se dire : l'autre est, donc je suis. L'existence du moi dépend ainsi de l'existence de l'autre, quel qu'il soit et où qu'il soit. Le moi et l'autre partagent le même destin. La durabilité du moi requiert la durabilité de l'autre.

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