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De La nécessité impérieuse de réformer la fonction du juge d'instruction

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Le code de procédure pénale (CPP) prévoit dans son article 30 que "le procureur de la république apprécie la suite à donner aux plaintes et dénonciations qu'il reçoit ou qui lui sont transmises".
Cela veut dire qu'en matière criminelle et facultativement (1) en matière correctionnelle, le procureur de la république ( PR ) qui détient et juge de l'opportunité des poursuites, décide seul s'il y'a ou pas matière à poursuivre.

Un système pervers, aveugle et injuste

Le PR qui statue presque systématiquement à charge, ouvre une information et désigne le juge d'instruction qui sera chargé de mener l'enquête judiciaire et d'instruire à charge et à décharge (art 53 et 69 CPP). Cela veut dire que le juge d'instruction globalement ( 2 ) ainsi désigné, devra réunir les preuves d'inculpation ou de mise hors de cause du prévenu.

Pour cela, il procède aux auditions, désigne les experts et se fait aider par les forces de l'ordre s'il le juge utile à la manifestation de la vérité. Étant à lui seul un degré de juridiction, ses décisions sont susceptibles d'appel devant Daïrt Al Ittihem ou chambre des mises en accusation. Cette dernière, étant une instance d'appel chargée de contrôler les actes accomplis par le juge d'instruction et statuant donc en dernier ressort, peut voir ses propres décisions attaquées par-devant la Cour de Cassation.

Cela peut prendre plusieurs mois voire même des années. C'est dire le calvaire que doit vivre le prévenu pour des actes qu'il n'a peut être pas commis.

Disons le tout de suite, c'est là un système pervers, aveugle et injuste qui au nom de pseudo garanties accordées au prévenu, fait courir à ce dernier la tragédie de sa vie.

Dés le départ, il faut savoir que la décision du PR de poursuivre ne souffrira d'aucun recours. Ce dernier est souverain. Il est libre de ses actes. Le volume des plaintes qu'il reçoit, les conditions matérielles de travail et le manque de ses effectifs l'empêchent la plupart du temps de réfléchir sur le bien fondé des requêtes qui lui parviennent.

Par ailleurs ouvrir une information judiciaire et confier l'affaire à un juge d'instruction lui sert de bouclier sur le plan personnel. Par cet acte, le PR se met à l'abri de tout reproche de ne pas poursuivre, reproche qui peut émaner de l'autorité de tutelle du fait du lien de subordination qui lie le parquet à l'exécutif en général et au ministère de la justice en particulier. Les instructions ouvertes tous azimuts après la révolution en sont la meilleure preuve.

L'instruction, que des dégâts

Les articles 50 et suivants du CPP marquent l'étendue des pouvoirs qui sont conférés au juge d'instruction.

Tout un programme. Pour peu que le juge se soit levé du pied gauche, pour peu qu'il souffre d'un problème d'argent, d'un désaccord à la maison et vous voilà dans de beaux draps. Ceux de la mornaguia bien sûr. N'est-il pas un être humain comme les autres? avec ses certitudes et ses défaillances ? Ses préjugés et ses fantasmes ?

Il vous convoque, vous laisse poireauter tant qu'il veut, emploie le ton qui lui plait et vous envoie pour un oui pour un non, croupir en prison pour 14 mois si cela lui chante.

Pour que ses décisions soient équilibrées, encore faut-il que le juge lui-même le soit. Qui pourra le certifier ? Certes ses décisions sont susceptibles d'appel mais le mal peut être déjà fait.

Celui qui a dit qu'on était innocent jusqu'à preuve du contraire n'a rien compris. Il s'est même lourdement trompé. En comparaissant devant un juge d'instruction, on joue sa vie, sa famille, ses enfants et son travail. Ce n'est pas normal et cela doit impérativement cesser.

Pour cela, le sort du justiciable doit être confié à une formation collégiale et non plus à un juge unique. C'est là le seul moyen d'éviter les abus et l'arbitraire. Cette formation comprendrait deux juges instructeurs qui opèreront sous le contrôle d'un président de chambre. Les décisions doivent être prises conformément à l'article 162 du CPP c'est à dire en formation collégiale.

Trois juges et non plus un seul auront ainsi accès au dossier et prendront la décision en totale concertation. Aucun reproche ne pourra plus être fait quant aux décisions prises et la chambre des mises en accusation n'aura plus sa raison d'être.

Car au fond à quoi cette dernière sert-elle hormis à allonger les délais dans le va et vient des dossiers au grand dam des prévenus et notamment ceux qui sont sous le coup d'un mandat de dépôt.

Combien de détenus croupissent en prison des années entières dans l'attente d'être jugés.

En adoptant cette réforme, la justice gagnerait en équité, en célérité, en efficacité et en transparence. Les bureaux seraient moins encombrés en terme de nombre de dossiers et les prisons seraient vidées de plus de la moitié de leurs détenus.

(1) art 47 cpp

(2) L'article 35 cpp prévoit en effet qu'en cas de crime flagrant, le juge d'instruction, peut dans sa circonscription , faire directement et par lui-même tous les actes attribués aux procureurs de la république, suivant la loi, tout en conservant les pouvoirs qui lui sont propres..."

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