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Tunisie - Dépôt légal: Les médias s'organisent contre le décret de Larayedh

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Dans le local d'Attariq Aljadid, Hichem Skik, rédacteur en chef du journal du parti Al Massar, est déterminé.

Le journal a décidé de porter un recours auprès du Tribunal administratif afin de suspendre l'exécution du décret réglementaire émis par l'ancien Premier ministre Ali Larayedh le 7 janvier dernier, deux jours avant d'annoncer sa démission.

Le décret en question fixe les procédures d'enregistrement et de dépôt légal, lequel doit se faire avant toute publication, selon ce nouveau texte.

"Ce n'est pas un nouveau texte mais une application du décret-loi 115. J'appelle ceux qui critiquent le gouvernement à relire ce texte", avait déclaré Abdessalem Zbidi, chargé de la communication au Premier ministère, au HuffPost Maghreb.

LIRE AUSSI: Dépôt légal avant publication, "un texte conforme au décret-loi 115" selon les autorités


Mais le décret du 7 janvier ne se limite pas à une simple "application" du décret-loi 115/2011 relatif à la liberté de la presse, de l'imprimerie et de l'édition.

Dans son article 5, ce décret émis par Ali Larayedh liste en effet les "oeuvres" soumises au dépôt légal avant publication, une liste exhaustive qui comprend tous les supports, y compris numériques ou magnétiques et "toutes les publications périodiques, qu’elle qu’en soit la forme".

Or le décret-loi 115 ne conditionne le dépôt légal avant publication que pour les oeuvres "non périodiques". Ainsi, le décret réglementaire vient ajouter une nouvelle restriction au décret-loi 115 ce qui, selon l'avocat Mohamed Lakhdhar, est illégal.

"Ce décret d’exécution ne doit se limiter qu'aux procédures permettant d'appliquer le décret-loi 115 et en aucun cas apporter des ajouts sur ce que dit la loi, qui lui est supérieure", a-t-il martelé.

Pour le rédacteur en chef d'Attariq Aljadid, il n'y a aucune raison d'imposer un dépôt légal avant publication autre que celle d'une tentative de contrôle des publications. "Nous avons combattu pendant des années ces méthodes sous Ben Ali et à présent elles sont à nouveau d'actualité", s'est-il indigné.

Si les médias étaient toujours sous le contrôle du régime de Ben Ali, ce dernier avait cependant supprimé en 2006 le dépôt légal pour les publications de presse nationales périodiques, rétablie par conséquent huit ans plus tard, sous le gouvernement d'Ali Larayedh.

Les directeurs de journaux à l'attaque

Egalement présents à la conférence organisée dans les locaux du journal d'Al Massar, les représentants de la Fédération tunisienne des directeurs de journaux (FTDJ) sont montés au créneau.

Nizar Bahloul, vice-président de la Fédération en charge de la presse électronique, a longuement pointé du doigt l'absurdité et l'impossibilité d'appliquer les dispositions du décret du 7 janvier, notamment concernant les médias en ligne.

"Ces procédures englobent les publications sur support numérique. Cela peut concerner même les blogs. Par exemple pour la presse électronique, comment fait-on? Si un article est prêt à être mis en ligne à minuit, il faut l’imprimer en six exemplaires et attendre le lendemain pour aller le déposer avant de pouvoir le publier?", s'est-il interrogé.

Tous les participants étaient pour autant d'accord avec le principe du dépôt légal, pour un archivage visant à entretenir la "mémoire collective".

"Mais le fait d'imposer le dépôt légal avant publication permettait aux autorités de censurer les publications en amont, en ne délivrant de récépissé que si le contenu était conforme à leurs exigences", a affirmé Taïeb Zahar, président de la FTDJ.

Les limites du décret-loi 115 ont enfin été soulevées par les intervenants. Selon Taïeb Zahar, président de la FTDJ, "il est nécessaire de s'unir afin d'élaborer une proposition de révision de ce décret-loi, notamment pour que les non périodiques ne soient plus soumis au dépôt légal préalable".

"Nous allons créer une commission de suivi pour le décret du 7 janvier et éventuellement dans le but de réviser le décret-loi 115, pour qu’il soit conforme à la Constitution", a conclut Hichem Skik.

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