Il était une fois une histoire vraie, celle d'un jeune matelot, Narcisse Pelletier embarqué sur la goélette St Paul en direction de l'Australie au milieu du XIXe siècle. Le bateau fait escale sur une terre inconnue en quête d'eau... Le jeune marin s'aventure plus loin que les autres et ses compagnons de voyage repartent sans lui, le laissant seul.
Plus de quinze années passent. Un navire anglais le retrouve et le ramène à Sidney. Là un jeune homme épris de sciences, de savoir et de découverte, Octave de Vallombrun, essaye de percer l'histoire de cet homme de 36 ans tatoué, fort, calme... Voici en quelques lignes un bref résumé du roman de François Garde « Ce qu'il advint du sauvage blanc » (Folio, 2013). Ce livre m'a transporté par son écriture, par le traitement de son sujet et par les questions soulevées.
Le récit est construit avec un double point de vue: un narrateur qui décrit la vie de Narcisse et les interrogations d'Octave accompagnées de ses lettres écrites au président de la Société de géographie. L'intérêt de l'ouvrage est que l'on ne sait jamais comment la tribu perçoit de l'intérieur Narcisse qui devient Amglo, ni les réponses du Président à Octave. Le récit est volontairement incomplet dans les informations qu'il nous donne sur les épreuves traversées par Narcisse, laissant libre cours à notre imagination.
Dans la suite du mythe de Robinson, à une époque où la civilisation était en Europe et imposait une suprématie blanche, cet ouvrage décrit la rencontre de deux approches de la vie et interpelle le lecteur. Peut-on, comme cela arrive à Narcisse, perdre sa langue, ses réflexes culturels, endosser jusqu'au fond de soi une autre culture que la nôtre, un autre mode de vie?
Dans un style élégant et sobre, François Garde nous traduit tout en nuances la foule de sentiments qui traverse Octave: de la fierté au doute. Et comme il l'écrit dans une de ses dernières lettres: " Nous ne saurons jamais comment le matelot... est devenu sauvage". Car Narcisse Pelletier, même s'il s'adapte de nouveau à sa nouvelle vie, à sa vie d'origine en quelque sorte, garde au fond de lui sa deuxième naissance qui semble au fil du temps avoir pris le pas sur l'autre. En effet, il s'est construit en tant qu'adulte sur cet ilot. Et c'est en l'observant comme homme que l'on perçoit tout ce qu'il a appris: la solidarité, la liberté et la violence de l'amour, l'utilisation de ce que nous offre la nature. Mais jamais nous ne saurons comment. Car au bout d'un énième échange, Narcisse avoue: "Parler c'est mourir". Alors notre imagination déborde au fil des lignes.
Comment Narcisse s'est-il intégré? Comment a-t-il survécu? Comment peut-on se sentir appartenir plus à une civilisation qu'à une autre?
Mais ce que pose Octave, ce qui l'interroge constamment est comment Narcisse a pu être heureux dans une autre civilisation que la sienne, vivant nu, sans ce confort moderne. Car pour ce jeune scientifique, et pour reprendre ses mots: "L'essentiel est dans la paix". Il interroge donc la possibilité de vivre paisiblement dans un autre monde que le sien, dans une autre civilisation, avec d'autres règles que celles martelées par les pays européens de l'époque.
Cet ouvrage offre par son écriture subtile, par la liberté qu'il laisse aux lecteurs d'imaginer la vie Narcisse dans cet ailleurs, une autre vision du monde: une vision plurielle qui en fait toute sa richesse.
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Plus de quinze années passent. Un navire anglais le retrouve et le ramène à Sidney. Là un jeune homme épris de sciences, de savoir et de découverte, Octave de Vallombrun, essaye de percer l'histoire de cet homme de 36 ans tatoué, fort, calme... Voici en quelques lignes un bref résumé du roman de François Garde « Ce qu'il advint du sauvage blanc » (Folio, 2013). Ce livre m'a transporté par son écriture, par le traitement de son sujet et par les questions soulevées.
Le récit est construit avec un double point de vue: un narrateur qui décrit la vie de Narcisse et les interrogations d'Octave accompagnées de ses lettres écrites au président de la Société de géographie. L'intérêt de l'ouvrage est que l'on ne sait jamais comment la tribu perçoit de l'intérieur Narcisse qui devient Amglo, ni les réponses du Président à Octave. Le récit est volontairement incomplet dans les informations qu'il nous donne sur les épreuves traversées par Narcisse, laissant libre cours à notre imagination.
Dans la suite du mythe de Robinson, à une époque où la civilisation était en Europe et imposait une suprématie blanche, cet ouvrage décrit la rencontre de deux approches de la vie et interpelle le lecteur. Peut-on, comme cela arrive à Narcisse, perdre sa langue, ses réflexes culturels, endosser jusqu'au fond de soi une autre culture que la nôtre, un autre mode de vie?
Dans un style élégant et sobre, François Garde nous traduit tout en nuances la foule de sentiments qui traverse Octave: de la fierté au doute. Et comme il l'écrit dans une de ses dernières lettres: " Nous ne saurons jamais comment le matelot... est devenu sauvage". Car Narcisse Pelletier, même s'il s'adapte de nouveau à sa nouvelle vie, à sa vie d'origine en quelque sorte, garde au fond de lui sa deuxième naissance qui semble au fil du temps avoir pris le pas sur l'autre. En effet, il s'est construit en tant qu'adulte sur cet ilot. Et c'est en l'observant comme homme que l'on perçoit tout ce qu'il a appris: la solidarité, la liberté et la violence de l'amour, l'utilisation de ce que nous offre la nature. Mais jamais nous ne saurons comment. Car au bout d'un énième échange, Narcisse avoue: "Parler c'est mourir". Alors notre imagination déborde au fil des lignes.
Comment Narcisse s'est-il intégré? Comment a-t-il survécu? Comment peut-on se sentir appartenir plus à une civilisation qu'à une autre?
Mais ce que pose Octave, ce qui l'interroge constamment est comment Narcisse a pu être heureux dans une autre civilisation que la sienne, vivant nu, sans ce confort moderne. Car pour ce jeune scientifique, et pour reprendre ses mots: "L'essentiel est dans la paix". Il interroge donc la possibilité de vivre paisiblement dans un autre monde que le sien, dans une autre civilisation, avec d'autres règles que celles martelées par les pays européens de l'époque.
Cet ouvrage offre par son écriture subtile, par la liberté qu'il laisse aux lecteurs d'imaginer la vie Narcisse dans cet ailleurs, une autre vision du monde: une vision plurielle qui en fait toute sa richesse.
