Avec la "lutte anti-terroriste" le discours sécuritaire s'intensifie, souvent adressé contre les extrémistes religieux ou considérés comme tels. Contrôle accru des hommes portant la barbe ou des femmes portant le niqab, ces dernières ont décidé de monter au créneau et d'organiser leur défense. Mot d'ordre: Liberté individuelle.
"Ma voix peut faire véhiculer mes idées"
"Le niqab n'a jamais été un frein pour que la femme ne soit pas active au sein de la société. Je peux conduire, aller travailler... Ma voix peut faire véhiculer mes idées", a soutenu une des intervenantes lors d'un congrès organisé ce mercredi 26 février, visant à sensibiliser l'opinion sur le port du voile intégral.
"Pour ce qui est de l'enseignement, mon esprit et ma langue suffisent à communiquer, pas mes vêtements. On ne va pas discuter de la raison religieuse qui justifierait le niqab, c'est quelque chose qui ne nous concerne pas ici. Pourquoi quand je rentre dans une administration, les gens se tournent vers moi et me regardent comme si j'étais un extraterrestre? Dans mon entreprise, que mon interlocutrice soit habillée ou pas, ce n'est pas le problème. Elle peut ne pas être habillée et être mieux dans sa pensée ou dans son comportement", a-t-elle poursuivi.
"Si elle porte une mini jupe, mon devoir est de la respecter"
Plusieurs autres femmes portant le niqab sont intervenues dans le même sens. "Dans ma famille ou dans la société, il y a toujours des remarques, comme quoi le niqab ce n'est pas dans nos coutumes, que ce serait un habit saoudien ou afghan... Les médias également en donnent une mauvaise image, alors que le niqab est présent depuis longtemps en Tunisie et dans de nombreux pays musulmans", affirme une deuxième intervenante.
"Si jamais il y a des personnes qui ont utilisé le niqab pour faire des choses illégales, il faut juger ces personnes et non l'ensemble", a-t-elle déclaré.
Cette dernière remarque fait référence aux dernières évolutions d'ordre sécuritaire, communiquées par le ministère de l'Intérieur, faisant état d'un contrôle renforcé des personnes portant le niqab. Cette mesure a été justifiée par le fait que des contrevenants à la loi, recherchés par la police, se cachaient sous ce vêtement.
"Cette mesure a été prise en raison des menaces terroristes enregistrées dans le pays et en raison du recours de certains suspects au niqab (...) pour se déguiser et fuir la justice", avait expliqué le ministère de l'Intérieur qui demandait la "compréhension de tous" afin d'"aider les unités sécuritaires à faire leur travail".
Quelques jours plus tôt, le journal télévisé de la première chaine nationale avait diffusé les images d'un homme portant le niqab, en état d'arrestation. Selon le président de la section de la police judiciaire de l'Ariana intervenant dans le reportage, cette personne appartiendrait au courant salafiste et était recherchée pour des actes de violence.
"Le niqab est une liberté individuelle qui fait partie de la liberté de croyance. Notre problème, nous les arabes, c'est que nous n'essayons pas de trouver des solutions, nous ne faisons qu'évoquer les problèmes", a déploré une troisième intervenante, lors de la conférence.
"Ce qui nous réunit, c'est l'humanité"
"Notre message par le biais de ce congrès est un message d'amour", a expliqué Nadia Kanoun, conseillère à l'ONU, vêtue d'un niqab. "Celle qui porte une mini jupe est libre, mon devoir est de la respecter et de l'aimer, parce que ce qui nous réunit c'est l'humanité. Nous sommes tous des êtres humains. Nous pouvons être en désaccord dans nos orientations, dans notre pensée, mais nous devons nous accepter tels que nous sommes", a-t-elle conclu.
Les femmes portant le niqab ont, à plusieurs reprises, reçu le soutien de Moncef Marzouki, Président de la République tunisienne. Marzouki a en effet invoqué la liberté vestimentaire en tant que liberté individuelle, pour justifier l'autorisation du niqab. Lors d'une interview récente sur Al Wataniya 1, il a indiqué que l'Etat n'était pas habilité à trancher sur cette question.
"S'il y a des doutes sur une personne portant le niqab, celle-ci peut être contrôlée par des agents de sexe féminin", a-t-il soutenu.
Interdiction du voile intégral en France depuis 2011
En 2011, une loi interdisant la "dissimulation du visage dans l'espace public" est entrée en vigueur en France, après un débat public passionné dans lequel s'entremêlaient des raisons de sécurité avec d'autres plus subjectives, invoquant le vivre-ensemble et des contraintes sociales ou des valeurs républicaines.
En 2010, le débat portait principalement sur l'attachement aux valeurs républicaines et le principe d'égalité entre les hommes et les femmes. Ainsi, la résolution du 11 mai 2010, adoptée par l'Assemblée nationale française, disposait "que les pratiques radicales attentatoires à la dignité et à l’égalité entre les hommes et les femmes, parmi lesquelles le port d’un voile intégral, sont contraires aux valeurs de la République".
Plusieurs associations et sociologues ont estimé que l'interdiction du voile intégral en France était liberticide et ses effets parfois contraires aux raisons invoquées. "Les musulmans se sont sentis concernés et ils ont très mal pris le fait qu’une loi vise spécifiquement les musulmans. Du coup, ils ont été nombreux à se radicaliser", avait déclaré à France 24 Agnès de Féo, sociologue à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), qui travaille sur la question depuis 2008.
Le débat s'installe en Europe
Au Royaume-Uni (depuis septembre dernier), comme dans d'autres pays d'Europe, le débat s'installe progressivement. Comment concilier le principe des libertés individuelles, parmi lesquelles celle du culte religieux, avec des problématique d'ordre sécuritaire?
Mais la question de l'interdiction du niqab embarrasse le pouvoir britannique, dont la ministre de l'intérieur, Theresa May, qui avait tenté de rassurer: "De façon générale, les femmes doivent être libres de décider ce qu'elles veulent porter", avait-elle indiqué. "Nous ne devons pas faire comme d'autres pays et émettre des commandements ou des lois disant aux gens ce qu'ils doivent porter", avait renchérit le vice-premier ministre, Nick Clegg.
En Tunisie, le port du niqab n'était pas toléré sous le régime Ben Ali qui réprimait toutes les formes d'islamisme. Cette tenue a ensuite connu un essor certain depuis la révolution de janvier 2011 et ne cesse de susciter le débat, entre respect des libertés individuelles et problématiques sécuritaires, en passant par l'attachement aux "valeurs de la République" ou à l'identité nationale.
"Ma voix peut faire véhiculer mes idées"
"Le niqab n'a jamais été un frein pour que la femme ne soit pas active au sein de la société. Je peux conduire, aller travailler... Ma voix peut faire véhiculer mes idées", a soutenu une des intervenantes lors d'un congrès organisé ce mercredi 26 février, visant à sensibiliser l'opinion sur le port du voile intégral.
"Pour ce qui est de l'enseignement, mon esprit et ma langue suffisent à communiquer, pas mes vêtements. On ne va pas discuter de la raison religieuse qui justifierait le niqab, c'est quelque chose qui ne nous concerne pas ici. Pourquoi quand je rentre dans une administration, les gens se tournent vers moi et me regardent comme si j'étais un extraterrestre? Dans mon entreprise, que mon interlocutrice soit habillée ou pas, ce n'est pas le problème. Elle peut ne pas être habillée et être mieux dans sa pensée ou dans son comportement", a-t-elle poursuivi.
"Les gens s'exclament et se demandent comment je fais pour voir. Je vois avec mes yeux, pas avec ma bouche ou mon nez. Pourquoi dois-je entendre ce type de remarque partout où je passe?", a conclu l'intervenante.
"Si elle porte une mini jupe, mon devoir est de la respecter"
Plusieurs autres femmes portant le niqab sont intervenues dans le même sens. "Dans ma famille ou dans la société, il y a toujours des remarques, comme quoi le niqab ce n'est pas dans nos coutumes, que ce serait un habit saoudien ou afghan... Les médias également en donnent une mauvaise image, alors que le niqab est présent depuis longtemps en Tunisie et dans de nombreux pays musulmans", affirme une deuxième intervenante.
"Si jamais il y a des personnes qui ont utilisé le niqab pour faire des choses illégales, il faut juger ces personnes et non l'ensemble", a-t-elle déclaré.
Cette dernière remarque fait référence aux dernières évolutions d'ordre sécuritaire, communiquées par le ministère de l'Intérieur, faisant état d'un contrôle renforcé des personnes portant le niqab. Cette mesure a été justifiée par le fait que des contrevenants à la loi, recherchés par la police, se cachaient sous ce vêtement.
"Cette mesure a été prise en raison des menaces terroristes enregistrées dans le pays et en raison du recours de certains suspects au niqab (...) pour se déguiser et fuir la justice", avait expliqué le ministère de l'Intérieur qui demandait la "compréhension de tous" afin d'"aider les unités sécuritaires à faire leur travail".
Quelques jours plus tôt, le journal télévisé de la première chaine nationale avait diffusé les images d'un homme portant le niqab, en état d'arrestation. Selon le président de la section de la police judiciaire de l'Ariana intervenant dans le reportage, cette personne appartiendrait au courant salafiste et était recherchée pour des actes de violence.
"Le niqab est une liberté individuelle qui fait partie de la liberté de croyance. Notre problème, nous les arabes, c'est que nous n'essayons pas de trouver des solutions, nous ne faisons qu'évoquer les problèmes", a déploré une troisième intervenante, lors de la conférence.
"Ce qui nous réunit, c'est l'humanité"
"Notre message par le biais de ce congrès est un message d'amour", a expliqué Nadia Kanoun, conseillère à l'ONU, vêtue d'un niqab. "Celle qui porte une mini jupe est libre, mon devoir est de la respecter et de l'aimer, parce que ce qui nous réunit c'est l'humanité. Nous sommes tous des êtres humains. Nous pouvons être en désaccord dans nos orientations, dans notre pensée, mais nous devons nous accepter tels que nous sommes", a-t-elle conclu.
Les femmes portant le niqab ont, à plusieurs reprises, reçu le soutien de Moncef Marzouki, Président de la République tunisienne. Marzouki a en effet invoqué la liberté vestimentaire en tant que liberté individuelle, pour justifier l'autorisation du niqab. Lors d'une interview récente sur Al Wataniya 1, il a indiqué que l'Etat n'était pas habilité à trancher sur cette question.
"S'il y a des doutes sur une personne portant le niqab, celle-ci peut être contrôlée par des agents de sexe féminin", a-t-il soutenu.
LIRE AUSSI: Le hijab est considéré comme la tenue vestimentaire la plus correcte en Tunisie, d'après une étude américaine
Interdiction du voile intégral en France depuis 2011
En 2011, une loi interdisant la "dissimulation du visage dans l'espace public" est entrée en vigueur en France, après un débat public passionné dans lequel s'entremêlaient des raisons de sécurité avec d'autres plus subjectives, invoquant le vivre-ensemble et des contraintes sociales ou des valeurs républicaines.
En 2010, le débat portait principalement sur l'attachement aux valeurs républicaines et le principe d'égalité entre les hommes et les femmes. Ainsi, la résolution du 11 mai 2010, adoptée par l'Assemblée nationale française, disposait "que les pratiques radicales attentatoires à la dignité et à l’égalité entre les hommes et les femmes, parmi lesquelles le port d’un voile intégral, sont contraires aux valeurs de la République".
Plusieurs associations et sociologues ont estimé que l'interdiction du voile intégral en France était liberticide et ses effets parfois contraires aux raisons invoquées. "Les musulmans se sont sentis concernés et ils ont très mal pris le fait qu’une loi vise spécifiquement les musulmans. Du coup, ils ont été nombreux à se radicaliser", avait déclaré à France 24 Agnès de Féo, sociologue à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), qui travaille sur la question depuis 2008.
Le débat s'installe en Europe
Au Royaume-Uni (depuis septembre dernier), comme dans d'autres pays d'Europe, le débat s'installe progressivement. Comment concilier le principe des libertés individuelles, parmi lesquelles celle du culte religieux, avec des problématique d'ordre sécuritaire?
"Mais que se passe-t-il donc au royaume du multiculturalisme? La Grande-Bretagne, qui n'a voté aucune loi sur les signes extérieurs religieux dans les écoles, qui traduit les documents administratifs dans les langues des immigrés à leur demande, qui se vante de sa tolérance, a vécu mi-septembre un débat révélateur. Plusieurs personnalités politiques, dont un secrétaire d'Etat, ont publiquement envisagé l'interdiction du niqab", ironisait Le Monde.
Mais la question de l'interdiction du niqab embarrasse le pouvoir britannique, dont la ministre de l'intérieur, Theresa May, qui avait tenté de rassurer: "De façon générale, les femmes doivent être libres de décider ce qu'elles veulent porter", avait-elle indiqué. "Nous ne devons pas faire comme d'autres pays et émettre des commandements ou des lois disant aux gens ce qu'ils doivent porter", avait renchérit le vice-premier ministre, Nick Clegg.
En Tunisie, le port du niqab n'était pas toléré sous le régime Ben Ali qui réprimait toutes les formes d'islamisme. Cette tenue a ensuite connu un essor certain depuis la révolution de janvier 2011 et ne cesse de susciter le débat, entre respect des libertés individuelles et problématiques sécuritaires, en passant par l'attachement aux "valeurs de la République" ou à l'identité nationale.
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