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Des femmes tunisiennes dans le panthéon politique

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"En politique, si vous voulez des discours, demandez un homme. Si vous voulez des actes, demandez une femme". Margaret Thatcher.

La nomination d'Amel Karboul au ministère du Tourisme a été précédée d'une rumeur selon laquelle le nouveau chef du gouvernement, Mehdi Jomâa, allait probablement nommer René Trabelsi, un Tunisien de confession juive, au même poste. Cette rumeur n'a a priori rien de fortuit et a eu peut-être l'intention d'atténuer le "choc" de l'accession d'une femme à un poste de pouvoir, traditionnellement attribué aux hommes.

En dépit de toutes les précautions prises, une vague de contestations a envahi l'espace public tunisien, notamment chez les plus puritains. Attaques virulentes, accusations calomnieuses et injures ont, de ce fait, entaché la première expérience politique en matière d'égalité des genres, et ce depuis l'ascension des islamistes au pouvoir. Pourtant, on ne peut reprocher cette attitude aux milieux réactionnaires actuels, mais à un passé où la femme tunisienne a souvent joué un rôle politique modeste.

A vrai dire, depuis l'indépendance, les femmes politiques tunisiennes n'ont pu se maintenir qu'à un seul ministère, celui de la femme et de la famille. D'autres portefeuilles ministériels leurs ont été accordés non sans mal: elles étaient éjectées au bout de quelques années pour "incompétence".

Le poste politique de prédilection reste ainsi intimement lié aux stéréotypes définissant la condition féminine, comme si la femme politique tunisienne doit être indéfiniment associée à son espace privé - qu'est le foyer - et se restreindre à sa fonction de procréation et d'éducation. Aussi, force est de constater que le réformisme de Bourguiba était gangréné par un conservatisme masculin qui l'empêchait de révolutionner la sphère politique et de nommer des femmes à des postes politiques imputés aux hommes comme celui de l'intérieur ou de la défense.

Plus tard, le régime de Ben Ali a maintenu le statut quo: durant 23 ans, peu de femmes ont été nommées à des postes ministériels habituellement octroyés aux hommes. De toute évidence, le réformisme tunisien a des limites à ne pas dépasser: le panthéon politique national s'avère être l'expression des archétypes masculins phallocratiques et une enceinte sacrée à laquelle seuls les hommes ont primordialement accès.

Après la chute du régime de Ben Ali, classe bien-pensante et partis politiques dits "progressistes" ont convenu que la femme tunisienne a massivement participé à l'effondrement de la dictature. Or, quelques exceptions sont allées au-delà des discours et ont appelé à l'égalité des chances dans un domaine réputé pour sa violence symbolique et sa misogynie. Les politiciens "progressistes" se sont ainsi trahis et on a découvert que le phallocentrisme masculin n'était pas seulement l'apanage des partis réactionnaires.

Il a fallu attendre le cinquième gouvernement et l'euphorie de l'achèvement de la nouvelle Constitution pour qu'on "glisse" timidement une femme dans un poste ministériel d'importance.

Dans un pays qui se targue de son féminisme avant-gardiste, la féminisation de la sphère politique est un mythe. Le taux de représentativité de la femme tunisienne en politique reste relativement bas. Cette situation indique que la Tunisie n'évolue pas, mais stagne et a du mal à surpasser le réformisme bourguibien de l'après indépendance. L'après 14 janvier vient confirmer ce constat: trois ans après "la révolution", seules quelques femmes ont pu accéder à des postes ministériels et la plupart d'entre elles ont été sévèrement critiquées et malmenées par l'opinion publique.

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